Cetteaffiche de propagande renvoie au bombardement anglo-amĂ©ricain de Rouen, aux premiĂšres heures de la nuit du 19 avril 1944. L’opĂ©ration alliĂ©e visait la destruction de l’importante gare de triage de Sotteville-lĂšs-Rouen. Dans la perspective du DĂ©barquement, il s’agissait de dĂ©truire les infrastructures sur les rives de la basse Seine, afin, le

From Wikimedia Commons, the free media repository Jump to navigation Jump to search Place du 19-Avril-1944 Upload mediaInstance ofsquarePart ofQ109659980LocationRouen, arrondissement of Rouen, Seine-Maritime, Normandy, Metropolitan France, France49° 26â€Č 36″ N, 1° 05â€Č 38″ EAuthority control Q109018417OpenStreetMap relation ID 13465109Reasonator ‱ Scholia ‱ PetScan ‱ statistics ‱ WikiMap ‱ Locator tool ‱ KML file ‱ WikiShootMe ‱ OpenStreetMap ‱ Search depicted Media in category "Place du 19-Avril-1944 Rouen" The following 8 files are in this category, out of 8 total. Place 19 Avril 1944 - Rouen FR76 - 2021-11-14 - 4,032 × 3,024; MB Place 19 Avril 1944 - Rouen FR76 - 2021-11-14 - 4,032 × 3,024; MB Place du 19 avril 1944 3,056 × 2,292; MB Place du 19 avril 1944 3,056 × 2,292; MB Place du 19 avril 1944 3,264 × 2,448; MB Plaque Place 19 Avril 1944 - Rouen FR76 - 2021-11-14 - 3,170 × 1,747; MB Plaque Place 19 Avril 1944 - Rouen FR76 - 2021-11-14 - 4,032 × 3,024; MB Rouen 2,448 × 3,264; MB Retrieved from " Categories Squares in RouenStreets in Rouen by nameMonuments and memorials in RouenNon-topical/index Uses of Wikidata InfoboxUses of Wikidata Infobox with mapsPages with maps

SadĂ©coration va crescendo du bas (fenĂȘtres en anse de panier puis fenĂȘtres Ă  meneaux) vers le haut , vĂ©ritable forĂȘt de pinacles, de clochetons, de gĂąbles et d'arcs-boutants. L'Ă©difice a Ă©tĂ© sĂ©vĂšrement touchĂ© par les bombardements des 18-19 avril 1944 et du 26 aoĂ»t 1944.

Aujourd'hui Exposition scientifique et technique Date du mardi 19 juillet 2022 au mercredi 31 aoĂ»t 2022 IdĂ©e sortie n° 246156 Jusqu’au 31 aoĂ»t vivez un Ă©tĂ© hors du temps Ă  l’Atrium. En compagnie des animateurs scientifiques voyagez de l'infiniment petit Ă  l'infiniment grand et dĂ©couvrez le monde qui vous entoure. Sorties Exposition artistique Date du mercredi 15 juin 2022 au dimanche 06 novembre 2022 IdĂ©e sortie n° 243138 Le dĂ©partement de la Seine-Maritime prĂ©sentera Ă  l’abbaye de JumiĂšges, du 15 juin au 6 novembre 2022, le projet A roof for silence, conçu par l’architecte libanaise Hala WardĂ©. Les 7 prochains jours Sorties MusĂ©e autre Date le samedi 20 aoĂ»t 2022 IdĂ©e sortie n° 246740 Dans le thĂšme des annĂ©es folles prĂ©parez vos objectifs et vos tenues les plus thĂ©matiques pour un temps de navigation Ă  bord du dernier remorqueur de Seine classĂ© monument historique. Un moment dans un dĂ©cor atypique pour faire vos plus belles photos. Sorties Visite patrimoine Date le dimanche 21 aoĂ»t 2022 IdĂ©e sortie n° 240866 Revivez le siĂšge de ChĂąteau-Gaillard cette forteresse dit imprenable lors d'une visite contĂ©e d'1h30 menĂ©e en costume d'Ă©poque. Au-delĂ  de 7 jours, 11 idĂ©es de sorties Sorties Concert autre Date le vendredi 26 aoĂ»t 2022 IdĂ©e sortie n° 243361 Notre-Dame de Bondeville vous invite Ă  chanter et danser en revivant la magie des annĂ©es 80 et 90 dans un spectacle incontournable. Sorties Festival musique Date le samedi 27 aoĂ»t 2022 IdĂ©e sortie n° 247288 festival de musique avec concerts gratuits et foire Ă  tout Sorties Brocante Date le samedi 27 aoĂ»t 2022 IdĂ©e sortie n° 247289 foire Ă  tout+ restauration sur place + concerts gratuits 300 exposants max. Sorties Visite patrimoine Date le dimanche 28 aoĂ»t 2022 IdĂ©e sortie n° 240867 Revivez le siĂšge de ChĂąteau-Gaillard cette forteresse dit imprenable lors d'une visite contĂ©e d'1h30 menĂ©e en costume d'Ă©poque. Sorties Salon Date le jeudi 08 septembre 2022 IdĂ©e sortie n° 231669 Les 24 Heures pour l’Emploi et la Formation – jeudi 8 septembre 2022 – ZĂ©nith de la MĂ©tropole de Rouen Normandie – 10h/19h – EntrĂ©e Gratuite. Sorties JournĂ©e du patrimoine Date le samedi 17 septembre 2022 IdĂ©e sortie n° 243025 Revivez le siĂšge de ChĂąteau-Gaillard cette forteresse dit imprenable lors d'une visite contĂ©e d'1h30 menĂ©e en costume d'Ă©poque. Sorties Visite patrimoine Date le samedi 24 septembre 2022 IdĂ©e sortie n° 245854 Revivez le siĂšge de ChĂąteau-Gaillard cette forteresse dit imprenable lors d'une visite contĂ©e d'1h30 menĂ©e en costume d'Ă©poque. Sorties Sports Date le dimanche 09 octobre 2022 IdĂ©e sortie n° 237353 Faire de cette journĂ©e, une sortie entre copains ou famille. Pour les initiĂ©s, soit le marathon ou le duo et pour les autres, participer Ă  l'Ekiden qui est une course qui se court Ă  6 5km, 10km, 5km, 10km, 5km et pour le dernier. Sorties Visite patrimoine Date le vendredi 04 novembre 2022 IdĂ©e sortie n° 245855 Revivez le siĂšge de ChĂąteau-Gaillard cette forteresse dit imprenable lors d'une visite contĂ©e d'1h30 menĂ©e en costume d'Ă©poque. Sorties Spectacles Date le samedi 05 novembre 2022 IdĂ©e sortie n° 232062 Pour le plus grand bonheur de tous, les personnages du phĂ©nomĂšne mondial Miraculous Ladybug et Chat Noir prennent vie dans un spectacle musical exceptionnel. Sorties Spectacles Date le dimanche 19 fĂ©vrier 2023 IdĂ©e sortie n° 216306 DĂ©couvrez "Wonderland", la tournĂ©e Ă©vĂ©nement pour toute la famille ! Plus de 10 artistes magiciens sur scĂšne parmi les meilleurs au monde mentalisme, grande illusion, quick-change, laser, humour...
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Revenons sur l’effroyable bombardement du 19 avril 1944, qui a transformĂ© Sotteville-lĂšs-Rouen en un champ de dĂ©combres, avec son chapelet de morts, de blessĂ©s, de disparus et de sans-abri
 Pendant la seconde guerre mondiale, l’aviation allemande puis alliĂ©e ont bombardĂ© Ă  38 reprises les installations ferroviaires, mais aussi et surtout la ville par manque de prĂ©cision. Mais, le bombardement de la nuit du 18 au 19 avril 1944 a Ă©tĂ© le plus terrible. En trois quarts d’heure, l’aviation anglo-amĂ©ricaine a provoquĂ© l’apocalypse sur Sotteville la ville est dĂ©vastĂ©e et le centre-ville a quasiment disparu. Pour l’occupant, le chemin de fer de Sotteville Ă©tait stratĂ©gique. La gare de triage l’une des plus grande d’Europe Ă  cette Ă©poque, ainsi que les ateliers d’entretien et de construction de matĂ©riel ferroviaire, Ă©tait utilisĂ©e par les armĂ©es allemandes, car le matĂ©riel et surtout la main d’Ɠuvre Ă©taient trĂšs prĂ©cieux. Afin de prĂ©parer le dĂ©barquement de Normandie et retarder les renforts allemands, l’objectif des alliĂ©s Ă©tait donc de dĂ©truire cet important nƓud ferroviaire. Peu aprĂšs minuit, les ronflements des 273 bombardiers Lancaster venus d’Angleterre ont commencĂ© Ă  se faire entendre, mais c’est seulement Ă  0 h 16, que l’alerte a Ă©tĂ© donnĂ©e. La population, surprise dans son sommeil, n’a ni le temps de sortir ni de s’abriter. Dans un premier temps, des fusĂ©es Ă©clairantes, des TI’s, Ă©taient lancĂ©es pour marquer les zones Ă  bombarder, mais des erreurs de marquage Ă©taient Ă  dĂ©plorer surtout au Nord. Le lĂ©ger vent les a aussi dispersĂ©es sur la ville. Les deux objectifs ont ensuite Ă©tĂ© bombardĂ©s l’objectif Sud Ă  partir de 0h20 partie de la gare de triage situĂ©e entre la gare voyageurs et les ateliers de Quatre Mares, puis l’objectif Nord Ă  partir de 0h40 dĂ©pĂŽt des locomotives. 6000 bombes ont Ă©tĂ© larguĂ©es sur Rouen, Bonsecours, Amfreville-la-Mivoie, Saint‑Etienne du Rouvray, Petit Quevilly, Grand Quevilly et Bois‑Guillaume. 3800 bombes sont tombĂ©es sur Sotteville-lĂšs-Rouen. La gare de triage n’a pas subi autant qu’elle aurait dĂ» en tant que cible 338 bombes seulement !, et ce sont les quartiers du vieux Sotteville » aux abords de celle-ci qui ont Ă©tĂ© les plus atteints. Il faut dire que chaque bombe avait de grandes chances de provoquer des dommages collatĂ©raux car – Elle Ă©tait considĂ©rĂ©e dans la cible si elle tombait Ă  moins de 500m de part et d’autre de celle-ci – soit une envergure de 1000m – mais la gare de triage ne faisait que 300m de large ! – Le choix obscur a Ă©tĂ© fait aborder la gare de triage avec un angle de 30°, et non en enfilade. – À une vitesse de 380 km/h, un avion met 3 secondes Ă  parcourir les 500 mĂštres qui sĂ©parent la gare de triage et le centre-ville. Pas Ă©vident donc de larguer les bombes au bon moment ! Plan des destructions par bombardements et dĂ©molitions lors de la Reconstruction. On constate que ce sont les quartiers proches des voies de chemin de fer qui ont le plus souffert
 Cliquez pour agrandir Cette nuit du 18 au 19 avril 1944 Ă©tait une opĂ©ration d’envergure qui comprenait aussi les installations ferroviaires de Tergnier, Juvisy et Noisy-le-sec. En avril et mai, ce sont au total 37 triages de France, Belgique et Allemagne de l’ouest qui ont Ă©tĂ© dĂ©truits. Le bilan du bombardement du 19 avril 1944 a Ă©tĂ© Ă©valuĂ© par la commune de Sotteville-lĂšs-Rouen Ă  561 morts, 14 disparus, 226 blessĂ©s graves, 1575 sinistrĂ©s et une centaine de blessĂ©s lĂ©gers, mais le nombre de victimes a dĂ» ĂȘtre plus Ă©levĂ©, car deux ans aprĂšs on retrouverait encore des cadavres dans les dĂ©combres
 Sotteville a Ă©tĂ© libĂ©rĂ©e le 31 aoĂ»t 1944. Le bilan de la guerre est lourd 722 morts sous les bombes, un tiers des habitations dĂ©truites et un tiers trop endommagĂ©es pour ĂȘtre reconstruites. Si le sujet vous intĂ©resse, vous pouvez lire le livre trĂšs prĂ©cis de Paul Le Trevier et Daniel Rose Ce qui s’est vraiment passĂ© le 19 avril 1944 » â–ș VOIR AUSSI Tous les articles sur Sotteville bombardĂ©e
Lesfaits se sont déroulés dimanche vers 14h, dans la rue, place du 19 avril 1944 prÚs du palais de justice de Rouen (Seine-Maritime). Capture d'écran @GoogleStreetView2017. Capture d'écran
Agenda d’un lycĂ©en, semaine du 19 avril [2] Il est un peu plus de minuit le 19 avril 1944. Les 160 000 personnes vivant dans l’agglomĂ©ration dorment. En cette nuit de terreur et de dĂ©solation, pendant 50 minutes, plus de 6 000 bombes de tous calibres s’abattent sur Rouen et ses alentours. 121 n’ont pas Ă©clatĂ©. On relĂšve 285 points de chute Ă  Rouen, 4 626 Ă  Sotteville-les-Rouen, 520 Ă  Saint-Etienne-du-Rouvray, 8 Ă  Peit-Quevilly, 12 Ă  Grand-Quevilly, 15 Ă  Bois-Guillaume, 13 Ă  Amfreville-la-Mivoie, 100 Ă  Bonsecours et 9 Ă  Belbeuf. C’était la nuit. Et je me rappelle que j’ai pris ça pour un orage parce que ça faisait un bruit Ă©norme et puis comme des Ă©clairs. A un moment, je me suis levĂ©, je venais d’avoir 16 ans, et je suis allĂ© trouver mes parents, et non, ce n’était pas un orage mais des bombes
 On a attendu, je ne pense pas qu’il y ait eu d’autres solutions ! Nous sommes descendus dans la salle et nous avons attendu jusqu’à ce que ce soit passĂ©. Ensuite, il y a un silence mortel aprĂšs un bombardement, on n’entend plus rien, c’est d’un calme Ă©pouvantable
 Et quelques minutes aprĂšs, on commence Ă  entendre les sirĂšnes des ambulances, mais sur le moment il y a eu tellement de bruit que ça fait un contraste extraordinaire, ce calme-lĂ . Et puis, petit Ă  petit, on a entendu des ambulances toute la nuit ! Jean, 16 ans. [2] Angle rue Saint-Denis et rue de la RĂ©publique [1] A Rouen sur la rive droite, plus de soixante rues et places sont touchĂ©es. La cathĂ©drale et le Palais de Justice sont Ă©ventrĂ©s. Le Théùtre Français, place du Vieux MarchĂ© est dĂ©truit. Les bombes abattent le corps de logis et la tourelle de l’hĂŽtel de Bourgtheroulde. La Cour des Comptes, rue des Carmes, s’enflamme. A l’HĂŽtel de Ville, l’escalier monumental est anĂ©anti. Les toitures de Saint-Ouen sont bouleversĂ©es. Rive gauche, les bombes sont tombĂ©es sur la gare d’OrlĂ©ans, le garage des autobus, sur la rue de Lessard, le dĂ©pĂŽt de tramways, etc. En sortant, nous avons remarquĂ© que la moitiĂ© de la maison s’était Ă©croulĂ©e, lĂ  oĂč il y avait une petite cour, l’escalier qui montait, la moitiĂ© de la maison Ă©tait tombĂ©e. Nous avons alors gagnĂ© les fonts baptismaux de la cathĂ©drale, sous la Tour Saint-Romain, et lĂ  nous avons vu la nef complĂštement Ă©ventrĂ©e, toutes les chaises Ă©taient ravagĂ©es, on voyait le vide vers la Seine, tout Ă©tait abattu, on a marchĂ© dans des gravats... Jacques, 6 ans. [2] IntĂ©rieur de la cathĂ©drale [1] Le bilan est catastrophique. A Rouen, plus de 600 immeubles sont sinistrĂ©s, dont 512 entiĂšrement dĂ©truits. De nombreuses villes de l’agglomĂ©ration connaissent des destructions mais c’est Ă  Sotteville-les-Rouen oĂč les dĂ©gĂąts sont les plus considĂ©rables 2 204 maisons dĂ©truites et 1 575 terriblement endommagĂ©es. DĂ©nombrer les morts avec certitude est chose impossible car il est des cadavres que l’on ne retrouvera jamais. Si l’on estime Ă  500 le nombre de blessĂ©s, dont 370 ont Ă©tĂ© hospitalisĂ©s, le nombre de morts et de disparus dĂ©passe le chiffre de 900 dont 271 tuĂ©s et 73 disparus pour Rouen, 516 tuĂ©s et 14 disparus pour Sotteville. La ville et l’agglomĂ©ration comptent dĂ©sormais 20 000 sinistrĂ©s de plus. Le Palais de Justice [1] L’abri oĂč nous allions habituellement, rue du Baillage, qui Ă©tait rĂ©servĂ© dans la journĂ©e aux Ă©coles, mais oĂč nous allions passer les nuits, Ă©tait fermĂ©. Et les barriĂšres du jardin SolfĂ©rino Ă©taient fermĂ©es, comme toutes les nuits. Alors nous avons sautĂ© les barriĂšres du jardin en robe de chambre et manteau, en chemise de nuit surtout – moi, j’avais le manteau et la chemise de nuit, je n’avais pas eu le temps de mettre la robe de chambre
 Le fils aĂźnĂ© des Emery m’a dit n’ayez pas peur Raymonde, c’est pas pour nous, c’est pas pour nous », et il essayait aussi de protĂ©ger sa femme. Nous nous sommes rĂ©fugiĂ©s Ă  six autour de l’arbre, le plus gros arbre du jardin, qui existe toujours. Nous Ă©tions presque les uns couchĂ©s sur les autres, avec Mme Emery, Mme Salvert. A un moment, Jacques me dit Vite, vite, Raymonde, cachez votre tĂȘte dans votre manteau, celle-lĂ  elle est pour nous », alors ça dĂ©gringolait, c’était une pluie de bombes. Je lui ai obĂ©i et, trĂšs vite, j’ai entendu Mme Salvert pousser un grand soupir comme quelqu’un qui a un gros chagrin
 Je lui disais Mme Salvert, ne pleurez pas, ça va se passer, ça va se passer », mais elle Ă©tait morte sur le coup, elle avait reçu un Ă©clat juste dans le cƓur. Et puis Mme Emery, Mme Henri Emery, a Ă©tĂ© elle aussi mortellement touchĂ©e. Moi, ce qui m’a fait le plus peur, c’est de voir brĂ»ler la Maison du Dessin je voyais les flammes arriver, c’est ce qui m’a le plus effrayĂ©e. Alors j’ai eu le rĂ©flexe de me lever pour fuir et je n’ai pas pu
 AprĂšs on m’a emmenĂ©e Ă  la Compassion sur une porte de bonnetiĂšre dĂ©montĂ©e, qu’on Ă©tait aller chercher Ă  la maison. Le lendemain, les enfants Emery sont retournĂ©s voir dans le jardin si nous n’avions pas oubliĂ©, perdu quelque chose, et c’est lĂ  qu’ils ont trouvĂ© mon pied qui Ă©tait restĂ© dans ma chaussure
 Raymonde, 22 ans. [2] Les nombreux cadavres retrouvĂ©s, ou ce qu’il en reste, seront rapidement mis en biĂšre et transportĂ©s, pour la rive droite dans l’église Saint-Ouen, pour la rive gauche dans l’église Saint-Sever. Spectacles et manifestations sportives sont supprimĂ©s. Evacuation aprĂšs les bombardements [1] Ceux qui sont morts, ils ne crient plus mais on essaye de les sortir des dĂ©combres. Mes premiers morts, je les ai vu comme ça, Ă©talĂ©s comme ça sous des couvertures et c’est lĂ  que la dĂ©fense passive faisait un travail formidable, c’étaient des gens admirables
 
 Ils dĂ©blayaient, parce que les rues n’étaient plus tracĂ©es, les bombes Ă©taient tombĂ©es partout, les maisons Ă©taient tombĂ©es dans les rues, il y avait des cadavres dans les maisons, il fallait dĂ©blayer tous ces gens, essayer de sortir ceux qui Ă©taient vivants, qui criaient et qui demandaient Ă  ce qu’on les sorte, qui Ă©taient blessĂ©s
 Ginette, 17 ans. [2] Au lendemain du bombardement la radio de Londres annonce que la gare de Sotteville avait Ă©tĂ© l’objectif des bombardiers, ce qui est d’un effet dĂ©plorable car l’objectif n’a pas Ă©tĂ© vraiment atteint. AprĂšs le bombardement du 19 avril, il y avait une ambiance un peu Ă©tonnante, on supportait ça, et les gens Ă©taient consternĂ©s. MĂȘme les mieux disposĂ©s envers les anglo-amĂ©ricains ne comprenaient pas trĂšs bien, ils se cherchaient parfois, pour se rassurer, des raisons pour expliquer. On se disait qu’aprĂšs tout, ils visaient peut-ĂȘtre ça et ça, il fallait essayer de se remettre le moral en place
 Mais c’était dur Ă  supporter que les Anglais et les AmĂ©ricains prennent si peu de cas de la population
 Jacques, 12 ans. Les survivants n’ont jamais pu oublier Il y a a quelques annĂ©es il y a eu une fĂȘte aĂ©rienne Ă  Boos, et il est revenu un B17, c’est-Ă -dire une forteresse volante. J’étais en train de dĂ©sherber mon jardin, il faisait trĂšs beau, c’était au mois de juin, je ne regardais pas en l’air, j’étais le nez dans les mauvaises herbes, et il y a eu un bruit d’avion et d’un seul coup, j’ai eu l’impression d’avoir un pain de glace dans le dos
 Je suis rentrĂ©e chez moi, mon fils m’a dit Mais tu es toute blanche ! ». J’avais la chair de poule et j’ai dit Ă  mon fils Je viens d’entendre une forteresse volante ». Lui, qui est un fana d’aviation, me rĂ©pond Eh bien oui, il devait en venir une ». Mais je n’ai pas pensĂ©, je n’ai pas analysĂ© Tiens, j’entends un avion » - des avions, j’en entends toute la journĂ©e, j’habite Mesnil-Esnard, tout prĂšs de l’aĂ©rodrome de Boos, - mais alors celui-lĂ  m’a fait une impression que je n’oublierai jamais
 Ginette, 8 ans. [2] [1] Rouen sous l’occupation Patrick Coiffier photos Bundesarchiv [2] Tous les tĂ©moignages sont extraits de Rouen, mĂ©moires 44. L’ñge des tĂ©moins est celui qu’ils avaient en 1944. L'utilisation des commentaires est dĂ©sactivĂ©e pour cette note.
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Concerts marchĂ©s, visites, confĂ©rences, manifestations culturelles, etc Vous trouverez obligatoirement quoi faire Ă  Rouen aujourd'hui, cette semaine, ce week-end ou pendant vos vacances dans des lieux comme 80 quai du havre, rouen, Hangar 107 quai de bethencourt, 76100 rouen, Presqu’üle rollet, rouen, 3 piĂšces muzik'club, 49 place du gĂ©nĂ©ral de gaulle, rouen, 25

Le Mur des Noms, MĂ©morial de la Shoah Corinne Bouillot. Le projet de pose de Stolpersteine dans l’agglomĂ©ration rouennaise vise, outre ses objectifs mĂ©moriels, pĂ©dagogiques et citoyens[1], Ă  impulser de nouvelles recherches sur des victimes de la Shoah tout en valorisant les travaux existants. Rendre un hommage individuel aux victimes, auxquelles la pose de ces pavĂ©s commĂ©moratifs redonne un nom et une identitĂ© devant leur dernier domicile, nĂ©cessite souvent de complĂ©ter les donnĂ©es biographiques disponibles — par exemple celles que l’on trouve sur la base en ligne des victimes du MĂ©morial de la Shoah[2]. Entreprendre ou faire connaĂźtre des recherches sur des victimes s’inscrit dans un processus d’individualisation de la mĂ©moire de la Shoah auquel Serge Klarsfeld a largement contribuĂ© pour l’ensemble de la France en Ă©tablissant la liste des personnes dĂ©portĂ©es avec mention de leur adresse au moment de leur arrestation[3]. Dans la mise en Ɠuvre du projet des Stolpersteine Ă  Rouen, nous entendons toutefois par derniĂšre adresse », conformĂ©ment aux choix de l’artiste Gunter Demnig, le dernier domicile librement choisi, donc avant un Ă©ventuel dĂ©part forcĂ© consĂ©cutif Ă  la guerre ou Ă  la persĂ©cution. Cette prĂ©cision est importante pour la prĂ©sente synthĂšse sur la famille Burstin, dont deux des membres, Osias et Ginette, n’ont pas Ă©tĂ© arrĂȘtĂ©s Ă  Rouen, mais Ă  Limoges. Avant de fournir des rĂ©sultats en partie inĂ©dits sur le parcours et le sort de cette famille, je rappellerai tout d’abord quelles sources il est possible d’exploiter et de croiser pour une recherche micro-historique de ce type. À Rouen, le projet des PavĂ©s de MĂ©moire a pu dĂšs ses origines s’appuyer sur le travail minutieux rĂ©alisĂ© durant de longues annĂ©es par Françoise Bottois, ancienne enseignante d’histoire-gĂ©ographie de l’acadĂ©mie de Rouen, sur les Juifs du Grand Rouen » de la pĂ©riode d’occupation et la Shoah. Son livre De Rouen Ă  Auschwitz[4], publiĂ© en 2015, restitue l’identitĂ© des victimes et les situe dans l’espace urbain. Il dĂ©crit succinctement de nombreux parcours individuels, tout en inscrivant l’étude locale dans le contexte plus large de la persĂ©cution des Juifs dans la France occupĂ©e. Les chercheurs Ă©tant souvent confrontĂ©s Ă  des sources lacunaires, voire contradictoires, il est nĂ©cessaire d’apporter rĂ©guliĂšrement des complĂ©ments et/ou des correctifs[5]. Ceux-ci n’empĂȘchent pas la persistance de zones d’ombre, et il faut parfois s’en tenir Ă  des hypothĂšses, y compris lorsque la fiabilitĂ© des sources disponibles est incertaine. La recherche biographique n’est donc jamais dĂ©finitive, car de nouvelles sources peuvent aussi ĂȘtre trouvĂ©es. C’est dans cette dĂ©marche que s’inscrit la prĂ©sente Ă©tude. Elle prend en compte le sort d’Osias Burstin, qui n’avait pas Ă©tĂ© recensĂ© comme Juif en octobre 1940 Ă  Rouen — alors que ce recensement constitue souvent le point de dĂ©part de la recherche pour une ville donnĂ©e. Elle actualise aussi les informations sur le parcours de sa fille Ginette, qui a survĂ©cu Ă  sa dĂ©portation Ă  Auschwitz, alors que plusieurs publications ou bases de donnĂ©es indiquent qu’elle y a Ă©tĂ© assassinĂ©e, sans doute sur la base de sources elles-mĂȘmes erronĂ©es[6]. Les sources exploitables pour reconstituer le parcours d’une victime sont nombreuses et variĂ©es ; elles sont internationales, nationales et locales. La consultation de diverses bases de donnĂ©es biographiques en ligne peut constituer un bon point de dĂ©part celle Ă©voquĂ©e plus haut du MĂ©morial de la Shoah ; celle de Yad Vashem, oĂč l’on trouve aussi des feuilles de tĂ©moignage dĂ©posĂ©es par les familles ; celles du ministĂšre français des ArmĂ©es Ă  consulter sur le site MĂ©moire des hommes » ; celle encore des dĂ©tenus des camps d’Auschwitz sur la page internet dĂ©diĂ©e du musĂ©e[7]. Le musĂ©e d’Auschwitz dĂ©tient des archives Ă  consulter sur place, mais ses archivistes peuvent aussi fournir aux chercheurs, Ă  distance, des informations relatives Ă  une victime Ă  partir des sources dont ils disposent. À l’échelle internationale Ă©galement, les Arolsen Archives ancien Service International de Recherches – ITS, Ă©tablies en Allemagne, constituent le principal centre de documentation et d’information sur la persĂ©cution nationale-socialiste. Elles ont mis en ligne une partie de leurs collections, mais peuvent aussi envoyer des documents sur demande. Pour la France, des recherches sont possibles au Centre de Documentation Juive Contemporaine CDJC, MĂ©morial de la Shoah dont l’objectif est, depuis ses origines, de documenter la persĂ©cution des Juifs en France pendant la Seconde Guerre mondiale. On n’oubliera pas, surtout, le Service historique de la DĂ©fense sa division des archives des victimes des conflits contemporains DAVCC, basĂ©e Ă  Caen, regroupe entre autres les dossiers de dĂ©portĂ©s ou internĂ©s de la Seconde Guerre mondiale, assassinĂ©s ou survivants, dont il s’agissait Ă  l’origine de faire valoir les droits. Pour reconstituer le parcours d’une famille et disposer d’élĂ©ments antĂ©rieurs Ă  la dĂ©portation, la consultation des sources locales est incontournable. Pour Rouen, on s’appuiera notamment sur les Archives dĂ©partementales de Seine-Maritime elles disposent par exemple des fichiers du recensement des Juifs d’octobre 1940 et des listes et procĂšs-verbaux d’arrestation pour les diffĂ©rentes rafles qui se sont succĂ©dĂ© dans l’agglomĂ©ration. Françoise Bottois a trĂšs largement exploitĂ© ces sources, parmi d’autres, pour rĂ©diger son livre Ă©voquĂ© plus haut, et Marie-Christine Hubert, chargĂ©e des recherches sur les fonds de la Seconde Guerre mondiale et associĂ©e au projet des Stolpersteine, peut fournir une aide aux chercheurs. Pour la prĂ©sente Ă©tude, les Ă©changes avec plusieurs historiens et historiennes dans diffĂ©rentes rĂ©gions, Françoise Bottois pour Rouen, mais aussi l’ancien archiviste Bernard Reviriego[8] pour la Dordogne et Bernard Pommaret, chercheur qui a beaucoup travaillĂ© dans les Archives dĂ©partementales de la Haute-Vienne[9], se sont rĂ©vĂ©lĂ©s extrĂȘmement prĂ©cieux pour croiser ou comparer les informations et reconstituer au moins partiellement l’itinĂ©raire des membres de la famille Burstin qui avaient quittĂ© Rouen pour s’établir en zone sud. La famille Burstin est originaire de Pologne. Osias Samuel est nĂ© le 24 mars 1893 Ă  Rawa-Ruska et son Ă©pouse Anna est nĂ©e Blanfeld le 15 aoĂ»t 1898 Ă  Brzezany. La Galicie, dont faisaient partie ces deux localitĂ©s, comptait une importante minoritĂ© de Juifs polonais principalement yiddishophones. RattachĂ©e Ă  l’Empire austro-hongrois au moment de leur naissance[10], la rĂ©gion redevient polonaise aprĂšs la PremiĂšre Guerre mondiale. On ne sait pas quand ils se sont mariĂ©s[11], mais leur fille aĂźnĂ©e, Clara, naĂźt le 19 aoĂ»t 1923 Ă  Vienne Autriche. ArrivĂ©s Ă  Rouen en 1924 en tant que ressortissants polonais[12], Osias, Anna et Clara emmĂ©nagent rue Samuel Bochard puis s’installent durablement dans un quartier modeste de l’est de la ville[13], oĂč vivent aussi d’autres familles juives Ă©trangĂšres. La fille cadette, Ginette, naĂźt Ă  Mont-Saint-Aignan le 20 avril 1926. Osias et Anna sont naturalisĂ©s Français le 18 septembre 1929, de mĂȘme que leur fille Clara nĂ©e Ă  l’étranger[14] — alors que Ginette, nĂ©e en France, est dĂ©jĂ  Française. De nombreuses familles juives Ă©trangĂšres arrivĂ©es Ă  la mĂȘme Ă©poque demandent la nationalitĂ© française et sont soucieuses de s’intĂ©grer, comme en tĂ©moignent entre autres les prĂ©noms qu’elles donnent Ă  leurs enfants. Au moment des recensements de population de 1931 et 1936, la famille habite 12 rue du Rempart Martainville dans le quatriĂšme canton de Rouen[15]. Les parents sont petits commerçants. D’abord commis-visiteur puis marchand de balais, Osias est ensuite marchand d’habits[16] en 1936, un commerce de vĂȘtements neufs et d’occasion Ă©tabli dans une loge sur le marchĂ© de la place Saint-Marc est inscrit Ă  son nom au registre du commerce de Rouen. Anna, quant Ă  elle, y a dĂ©jĂ  Ă©tĂ© enregistrĂ©e en 1929 comme marchande ambulante en bonneterie[17] ; mais sans doute travaille-t-elle dĂ©sormais avec son mari. Dans les registres du recensement des Juifs, en 1940 cf. infra, leurs deux filles sont dĂ©clarĂ©es sans profession[18], et on ne dispose pas d’élĂ©ments concernant leur parcours scolaire ; peut-ĂȘtre aident-elles, Ă  ce moment-lĂ , leur mĂšre sur le marchĂ©. Au moment du recensement des Juifs d’octobre 1940, imposĂ© par les autoritĂ©s allemandes et effectuĂ© par les administrations françaises, Anna, Clara et Ginette rĂ©sident au 43 rue Victor Hugo, non loin de leur prĂ©cĂ©dente adresse — mais on ne sait pas Ă  quel moment, entre 1936 et 1940, la famille Burstin y a emmĂ©nagĂ©. Un T rouge inscrit sur le registre du ContrĂŽle des IsraĂ©lites » indique que toutes trois font apposer le tampon Juive » sur leur carte d’identitĂ©[19]. Osias, quant Ă  lui, ne se fait pas recenser. On peut supposer qu’il a quittĂ© Rouen entre mai ou juin 1940 et octobre 1940, puisque dans un dossier d’aprĂšs-guerre, sa fille Ginette indique qu’il Ă©tait rĂ©fugiĂ© en zone libre »[20]. Il est possible qu’il ait Ă©tĂ© dĂ©naturalisĂ©, Ă  cette Ă©poque ou plus tard, en application de la loi du 23 juillet 1940 sur la rĂ©vision des acquisitions de nationalitĂ© française intervenues depuis 1927 sur diffĂ©rentes listes ultĂ©rieures de victimes du nazisme cf. infra, il apparaĂźt en effet comme Polonais. Sur les raisons du dĂ©part d’Osias Burstin, qui laisse donc sa famille Ă  Rouen, il reste difficile de fournir des donnĂ©es fiables et surtout datĂ©es, mais plusieurs Ă©lĂ©ments permettent de penser qu’il a rejoint un rĂ©seau de rĂ©sistance en zone non occupĂ©e. Son nom sans autre indication apparaĂźt en effet sur deux listes de rĂ©sistants polonais dans des publications diffĂ©rentes une liste de combattants juifs polonais de la POWN morts en France en 1944 », avec une brĂšve introduction prĂ©cisant qu’elle comporte les noms des Juifs polonais en France occupĂ©e qui se sont portĂ©s volontaires pour rejoindre la POWN et sont tombĂ©s dans la lutte contre l’Allemagne en France, la plupart en 1944 Ă  Lyon et dans les environs »[21] ; une liste polonaise des membres du mouvement de rĂ©sistance morts en France pour la libertĂ© »[22]. La POWN Organisation polonaise de lutte pour l’indĂ©pendance n’a Ă©tĂ© créée qu’en 1941, mais regroupait les Ă©bauches de mouvements de rĂ©sistance qui avaient spontanĂ©ment prolifĂ©rĂ©, particuliĂšrement en zone libre »[23]. Un renseignement fourni par sa fille Ginette aprĂšs-guerre peut par ailleurs confirmer qu’il a exercĂ© des activitĂ©s de rĂ©sistance Ă  un moment ou Ă  un autre Ă©voquant sa propre arrestation en mars 1944 cf. infra, elle indique que celle-ci a eu lieu Ă  leur domicile de Limoges dans le cadre d’une perquisition de la Gestapo consĂ©cutive Ă  l’arrestation d’Osias[24]. Ginette ne fait certes pas mention des activitĂ©s de rĂ©sistant de son pĂšre dans la demande d’attribution du titre d’internĂ© politique qu’elle adresse alors aux ministĂšre des Anciens Combattants et Victimes de Guerre[25], mais peut-ĂȘtre Osias ne l’en avait-il pas informĂ©e pour la protĂ©ger. Il avait par ailleurs continuĂ©, Ă  Limoges, Ă  exercer sa profession de commerçant, dont on retrouve la mention sur divers documents. Ginette a rejoint son pĂšre en zone sud, sans sa mĂšre ni sa sƓur. Le 15 janvier 1943, sa prĂ©sence et celle d’Osias est attestĂ©e Ă  Limoges c’est le moment oĂč ils font apposer la mention Juif / Juive » sur leur carte d’identitĂ©, en application de la loi du 11 dĂ©cembre 1942 — pour la zone sud cette fois, occupĂ©e depuis novembre. À ce moment-lĂ , ils rĂ©sident 5 place de la Motte dans le centre de Limoges[26]. Les sources consultĂ©es ne permettent pas de savoir Ă  quelle date Ginette a quittĂ© Rouen, mais on peut supposer qu’elle l’a fait Ă  la fin de l’annĂ©e 1942 ou au dĂ©but de l’annĂ©e 1943, puisqu’elle apparaĂźt encore sur une liste de Juifs rĂ©sidant Ă  Rouen datĂ©e du 22 octobre 1942[27] et ne figure pas parmi les personnes dont on cherche Ă  localiser la nouvelle adresse en vue de la rafle rouennaise de janvier 1943[28]. En revanche, on peut reconstituer avec plus de certitude le parcours de sa mĂšre Anna et de sa sƓur Clara, qui subissent le sort rĂ©servĂ© Ă  la majoritĂ© des Juifs rouennais, de la discrimination Ă  l’arrestation sur place puis Ă  la dĂ©portation. En fĂ©vrier 1941, Anna, qui a repris, aprĂšs le dĂ©part de son mari, la loge du marchĂ© Saint-Marc que lui loue la ville de Rouen et oĂč elle vend des vĂȘtements, est dessaisie de son commerce. D’abord gĂ©rĂ© par un administrateur provisoire, il est liquidĂ© en juin 1941, aprĂšs qu’elle a Ă©tĂ© radiĂ©e du registre du commerce. AprĂšs sa spoliation, qui frappe aussi les autres commerçants juifs rouennais, elle n’a quasiment plus de moyens de subsistance[29]. En juin 1942, Anna, Clara et Ginette figurent sur une liste des Juifs de l’agglomĂ©ration rouennaise ayant retirĂ© leurs insignes » Ă©toiles jaunes[30], dont le port vient d’ĂȘtre rendu obligatoire, pour la zone occupĂ©e, par l’ordonnance allemande du 29 mai 1942. Lors de la troisiĂšme rafle de Juifs Ă  Rouen, dans la nuit du 15 au 16 janvier 1943, opĂ©rĂ©e par la police française sur ordre de la section antijuive de la Gestapo de Paris transmis par la Sipo-SD rĂ©gionale, Anna et Clara Burstin sont arrĂȘtĂ©es Ă  leur domicile rue Victor Hugo[31]. AprĂšs avoir passĂ© le reste de la nuit au centre d’accueil » de la rue Poisson Ă  Rouen, elles sont conduites, avec les autres personnes raflĂ©es, au camp de Drancy. Elles sont dĂ©portĂ©es par le convoi no 48 du 13 fĂ©vrier 1943 Ă  Auschwitz-Birkenau oĂč elles sont assassinĂ©es, vraisemblablement dĂšs leur arrivĂ©e[32]. Dans la demande d’attribution du titre de dĂ©portĂ©e politique pour sa mĂšre qu’elle remplit aprĂšs la guerre, Ginette indique qu’elle a reçu une carte de Drancy en fĂ©vrier 1943, mais qu’elle n’a eu depuis aucune nouvelle »[33]. Extrait d’une liste de Juifs arrĂȘtĂ©s Ă  Rouen le 15/16 janvier 1943 ADSM 3352W2 Osias et Ginette Burstin sont arrĂȘtĂ©s le 21 mars 1944 Ă  Limoges. Osias est arrĂȘtĂ© par les Allemands », en sortant d’une librairie », prĂ©cise Ginette aprĂšs-guerre dans la demande d’attribution du titre d’internĂ© politique pour son pĂšre[34]. Il a manifestement Ă©tĂ© arrĂȘtĂ© par la Gestapo[35], place Dussoubs dans le centre-ville, selon les sources des Archives dĂ©partementales de la Haute-Vienne[36]. Ginette est quant Ă  elle arrĂȘtĂ©e Ă  leur domicile 5 place de la Motte, alors que la Gestapo y effectue une perquisition aprĂšs avoir arrĂȘtĂ© Osias[37]. Ils sont tous deux incarcĂ©rĂ©s Ă  la prison de Limoges. De la prison de Limoges, Osias est amenĂ© avec 24 autres personnes Ă  Sainte-Marie-de-Chignac, en Dordogne Ă  une centaine de kilomĂštres, pour y ĂȘtre exĂ©cutĂ© le 27 mars 1944. Le massacre de Sainte-Marie-de-Chignac, qui s’inscrit dans une sĂ©rie de reprĂ©sailles consĂ©cutives Ă  des actions de la RĂ©sistance en Dordogne, est perpĂ©trĂ© par un dĂ©tachement de la division Brehmer commandĂ© par le sous-lieutenant Michael Hambrecht, chef de la Sipo-SD de Dordogne 25 otages amenĂ©s de Limoges, des rĂ©sistants et une majoritĂ© de victimes juives, sont fusillĂ©s au lieu-dit Les Potences, Ă  l’endroit oĂč, quelques jours plus tĂŽt, un convoi allemand a Ă©tĂ© attaquĂ© par la RĂ©sistance. Deux d’entre eux, seulement blessĂ©s, survivent[38]. Le nom de Burstein O. » figure sur la stĂšle de RiviĂšres basses Ă  Sainte-Marie-de-Chignac, qui honore la mĂ©moire des 23 victimes de la barbarie allemande — 27 mars 1944 »[39]. Osias a pu ĂȘtre identifiĂ© par une ordonnance, dĂ©livrĂ©e par une pharmacie de Limoges, qu’il portait sur lui le jour de son exĂ©cution c’est sur cette base que la mairie de Sainte-Marie-de-Chignac Ă©tablit un bulletin de dĂ©cĂšs en 1953[40]. AprĂšs 1945, des documents comportant des erreurs ont rendu difficile, pour le ministĂšre des Anciens Combattants et Victimes de Guerre, la reconstitution exacte du parcours d’Osias Burstin. Ayant Ă©tĂ© exĂ©cutĂ© aprĂšs avoir Ă©tĂ© dĂ©tenu Ă  Limoges, il a parfois Ă©tĂ© considĂ©rĂ©, Ă  tort, comme fusillĂ© dans cette ville[41]. Ainsi Ginette a-t-elle eu, aprĂšs la guerre, beaucoup de difficultĂ©s Ă  obtenir des informations fiables sur ce qu’était devenu son pĂšre. De Limoges, Ginette Burstin est transfĂ©rĂ©e Ă  Drancy le 7 avril 1944 et dĂ©portĂ©e Ă  Auschwitz-Birkenau par le convoi no 71 du 13 avril 1944[42]. Sur la liste de dĂ©portation, sa profession indiquĂ©e est magasiniĂšre[43]. À l’arrivĂ©e du convoi, dans la soirĂ©e du 15 avril 1944[44], elle est sĂ©lectionnĂ©e pour le travail sous le matricule 78573. Elle a Ă  peine 18 ans au moment oĂč elle entre dans le camp. Ginette Kolinka, survivante du convoi 71, ne se souvient pas de Ginette Burstin ; elle a un vague souvenir d’une Ginette jeune, mais ce prĂ©nom Ă©tait trĂšs courant Ă  l’époque, prĂ©cise-t-elle elle-mĂȘme[45]. Les archives du musĂ©e d’Auschwitz m’ont transmis sa fiche de travail Arbeitseinsatz », qui comporte toutefois trĂšs peu d’informations son nom et son prĂ©nom orthographiĂ© Genette », sa date de naissance, son matricule, sa nationalitĂ© Juive française » et sa profession d’origine vendeuse. Les cases relatives aux commandos et besognes auxquels elle a Ă©tĂ© affectĂ©e sont vierges. Ginette survit. Elle est libĂ©rĂ©e le 27 janvier 1945 par l’ArmĂ©e rouge. Elle est alors hospitalisĂ©e sur place, Ă  l’hĂŽpital de la Croix-Rouge polonaise installĂ© dans le camp principal Auschwitz I[46]. Elle fait ainsi partie des quelque 7000 dĂ©tenus qui n’ont pas pu faire les marches de la mort » et se trouvaient donc encore au camp Ă  l’arrivĂ©e des SoviĂ©tiques, trĂšs malades ou extrĂȘmement affaiblis. Ginette apparaĂźt sur une liste de ressortissants français prĂ©sents au camp d’Auschwitz » datĂ©e du 14 avril 1945, mais ne figure plus sur la liste complĂ©mentaire de 17 Français qui y sont encore le 14 juin 1945[47]. Sans doute a-t-elle quittĂ© Auschwitz juste avant cette seconde date, car elle est rapatriĂ©e par Marseille le 7 juillet 1945[48]. Les transports de rapatriement de Français libĂ©rĂ©s au moment de l’avance des troupes soviĂ©tiques empruntaient l’itinĂ©raire suivant de Katowice Ă  Odessa, par la mer Noire et la MĂ©diterranĂ©e jusqu’à Marseille. Le navire alliĂ© Ascanius, qui transportait plus de 1900 prisonniers de guerre et dĂ©portĂ©s dont une centaine de femmes, semble ĂȘtre parti d’Odessa le 22 juin 1945. Il arrive dans le port de Marseille dans la journĂ©e du 7 juillet et les rapatriĂ©s sont conduits au centre de la Madrague — l’un des principaux centres d’accueil en France —, qu’ils quittent aprĂšs avoir reçu un colis alimentaire, des tickets d’alimentation et une petite somme d’argent[49]. De retour Ă  Limoges oĂč elle se rĂ©installe sa prĂ©sence y est attestĂ©e en aoĂ»t 1945, Ginette Burstin engage immĂ©diatement des recherches concernant le sort de son pĂšre[50] — qu’elle poursuit auprĂšs du ministĂšre des Anciens Combattants et Victimes de Guerre jusque dans les annĂ©es 1950[51]. Elle-mĂȘme bĂ©nĂ©ficie, Ă  son retour de dĂ©portation, des aides du COSOR / COJASOR ComitĂ© des Ɠuvres sociales des organisations de la RĂ©sistance / ComitĂ© juif d’action sociale et de reconstruction sa fiche mentionne qu’elle est dans un Ă©tat de trĂšs grande dĂ©pression nerveuse » et qu’ un secours est trĂšs nĂ©cessaire »[52]. Peu aprĂšs son retour, elle rend nĂ©anmoins visite Ă  ses anciennes voisines Ă  Rouen, Linda, Pauline et Gaby Ganon, sans doute pour obtenir des informations sur le sort de sa mĂšre et de sa sƓur dans les demandes qu’elle remplit ultĂ©rieurement, elle nomme en effet Madame Ganon comme tĂ©moin de l’arrestation d’Anna et de Clara en janvier 1943[53]. Il semble qu’à l’occasion de cette visite, elle leur ait fait part de son dĂ©sir d’émigrer au plus vite aux États-Unis[54]. Une fiche datĂ©e de 1948 conservĂ©e aux Arolsen Archives montre en tout cas qu’un dossier de demande d’émigration a Ă©tĂ© ouvert Ă  son nom auprĂšs du Joint » American Jewish Joint Distribution Committee[55]. On peut supposer que Ginette avait de la famille aux USA — les Burstin originaires de Pologne y sont nombreux — mais que sa demande d’immigration n’a donc pas abouti. Au plus tard en 1947, elle rĂ©side Ă  Paris. En 1953, elle exerce la profession d’aide-comptable et est encore cĂ©libataire[56]. On apprend par son acte de dĂ©cĂšs qu’elle s’est ensuite mariĂ©e. Elle dĂ©cĂšde le 26 aoĂ»t 1988 Ă  son domicile de Clichy-la-Garenne. Les informations croisĂ©es sur le sort qu’ont subi les quatre membres de la famille Burstin de Rouen donnent un aperçu de la mise en Ɠuvre de la Shoah en France[57], dans la zone occupĂ©e et dans la zone dite libre oĂč se sont rĂ©fugiĂ©s de nombreux Juifs, mais qui est envahie Ă  son tour en novembre 1942. DiscriminĂ©s, fichĂ©s, dĂ©possĂ©dĂ©s de leurs biens, stigmatisĂ©s par l’étoile jaune en zone occupĂ©e et par un tampon spĂ©cial apposĂ© sur leur carte d’identitĂ© dans toute la France, les Juifs français et Ă©trangers sont systĂ©matiquement traquĂ©s, arrĂȘtĂ©s, dĂ©portĂ©s, avec la complicitĂ© de l’État français et des administrations françaises. Quand ils ne sont pas victimes de la dĂ©portation — le sort trĂšs largement majoritaire des Juifs de France assassinĂ©s —, ils sont exĂ©cutĂ©s comme Osias, sorti de la prison oĂč il a Ă©tĂ© incarcĂ©rĂ© pour ĂȘtre fusillĂ©. Peu de dĂ©portĂ©s juifs rentrent des camps comme Ginette, qui, extrĂȘmement affaiblie par des mois de travaux forcĂ©s et de mauvais traitements Ă  Auschwitz, doit encore affronter la disparition de sa mĂšre, de son pĂšre et de sa sƓur. À 19 ans au moment de son retour, elle est, avec Denise Holstein, qui vit encore aujourd’hui et a longtemps tĂ©moignĂ© de ce qu’elle avait subi, la seule jeune femme rouennaise rescapĂ©e d’Auschwitz — parmi les quelque 300 Juifs de l’agglomĂ©ration arrĂȘtĂ©s sur place ou hors du dĂ©partement, dont 241 au moins, et sans doute davantage, ne sont pas rentrĂ©s des camps de concentration et des centres de mise Ă  mort[58]. Au printemps 2021, Ă  l’occasion de la deuxiĂšme phase du projet des Stolpersteine, quatre PavĂ©s de MĂ©moire doivent ĂȘtre posĂ©s devant le 43 rue Victor Hugo, dans le centre de Rouen, pour honorer la mĂ©moire d’Osias, d’Anna, de Clara, assassinĂ©s, et de Ginette, aujourd’hui dĂ©cĂ©dĂ©e et Ă  laquelle sans doute personne n’a encore pu rendre hommage. NOTES [1] Voir Ces objectifs sont rappelĂ©s dans C. Bouillot, Stolpersteine dans l’agglomĂ©ration rouennaise les enjeux europĂ©ens et locaux d’un projet mĂ©moriel, Ă©ducatif et citoyen », in L’Atelier des Savoirs, [2] Cette base est rĂ©guliĂšrement actualisĂ©e, comme pour les quatre membres de la famille Burstin, sur lesquels ValĂ©rie Kleinknecht, du MĂ©morial, a rĂ©digĂ© en septembre 2020 de nouvelles notices reposant sur la synthĂšse des recherches que j’avais commencĂ© Ă  Ă©tablir. [3] S. Klarsfeld, MĂ©morial de la DĂ©portation des Juifs de France, Paris, Fils et filles des dĂ©portĂ©s juifs de France, 2012 nouvelle Ă©dition ; l’édition originale date de 1978. [4] F. Bottois, De Rouen Ă  Auschwitz les Juifs du Grand Rouen » et la Shoah, 9 juin 1940-31 juillet 1944, Nice, Ovadia, 2015. Une réédition corrigĂ©e et augmentĂ©e est prĂ©vue pour 2021. [5] Ce que F. Bottois a fait elle-mĂȘme pour la premiĂšre Ă©dition de notre projet, en rĂ©digeant des biographies par famille bientĂŽt disponibles en ligne sur [6] C’est le cas pour la base de donnĂ©es des noms des victimes de la Shoah de Yad Vashem qui s’appuie ici sur l’édition de 1978 du MĂ©morial de la dĂ©portation des Juifs de France, et pour la premiĂšre Ă©dition du livre de F. Bottois citĂ© prĂ©cĂ©demment. [7] ; ; [8] Ancien conservateur en chef du patrimoine aux Archives dĂ©partementales de la Dordogne et auteur de l’ouvrage Les Juifs en Dordogne 1939-1944 de l’accueil Ă  la persĂ©cution, PĂ©rigueux, Éditions Fanlac / Archives dĂ©partementales de la Dordogne, 2003. [9] Ancien professeur agrĂ©gĂ© d’histoire-gĂ©ographie et auteur d’un manuscrit non publiĂ© sur les dĂ©portĂ©s de la Haute-Vienne. [10] Voir l’acte de naissance d’Osias bilingue allemand-polonais sur la base Jewish Records of Poland. [11] Ginette Burstin prĂ©cise aprĂšs la guerre que ses parents se sont mariĂ©s Ă  l’étranger. DAVCC, AC21P431978 dossier Osias Burstin, courrier du [12] Archives dĂ©partementales de Seine-Maritime ADSM, 22W/Z11648 dossier d’étranger d’Anna Burstin. Pour Osias, le dossier d’étranger n’a pas Ă©tĂ© retrouvĂ©. [13] On les trouve en 1926 rue du Ruissel dans le 3e canton, ADSM, 6M0675. [14] Archives nationales en ligne, BB/11, 17765 X 29. [15] ADSM, 6M0686/6M0728. [16] Ibid., 6M0675/6M0686/6M0728 recensements de population de 1926, 1931 et 1936. [17] Ibid., 6U8/451 et 6U8/446 fiches individuelles et extraits du registre analytique, communiquĂ©s par Hubert. Le commerce d’Osias Burstin est enregistrĂ© le 5 novembre 1936 sous le numĂ©ro 29557. [18] Ibid., 3352W2, ContrĂŽle des IsraĂ©lites ». [19] Ibid. Pour le contexte, voir F. Bottois, op. cit., p. 41-52. [20] DAVCC, AC21P431978. [21] Ce document est associĂ© Ă  une entrĂ©e Osias Burstin » sur la base de donnĂ©es des victimes de Yad Vashem. Il s’agit visiblement d’un extrait d’un ouvrage polonais, mais sans indication de source. Introduction traduite ici du polonais. [22] Extraite de l’ouvrage Dzieje Armii Polskiej we Francji 1939-1945 histoire de l’armĂ©e polonaise en France, par L’Hopitalier, Cpt., Paris, Montbrun, 1950, p. 208. Copie transmise par B. Pommaret. [23] Elle dĂ©pendait du gouvernement polonais de Londres et menait notamment des activitĂ©s dans le domaine du renseignement. Voir Bruno Drweski, La POWN un mouvement de rĂ©sistance polonais en France », in Revue des Études slaves, 1987, Tome 59, fascicule 4, p. 741-752. [24] DAVCC, AC21P719928 dossier Ginette Burstin, soulignĂ© par moi. Je remercie Chantal Dossin de m’avoir transmis ce dossier que je n’avais pas encore pu consulter sur place. [25] Ibid., AC21P431978. [26] Informations de B. Pommaret. Sources Archives dĂ©partementales de la Haute-Vienne ADHV, 993W224. [27] ADSM, 54W5320. [28] Du moins, on n’en retrouve pas la trace dans les dossiers correspondants, ADSM, 3352W2. [29] F. Bottois, op. cit., p. 100-101. Dans le dossier d’aryanisation CDJC, AJ38/4 980, 1775, il est question de la radiation de Mme Burstin du registre du commerce en date du 7 juin 1941 », alors que sur le registre du commerce de Rouen lui-mĂȘme, c’est Osias qui est considĂ©rĂ© comme radiĂ© Ă  cette date ADSM, 6U8/451. [30] ADSM, 3352W2. [31] Sur le contexte et l’organisation de cette rafle, destinĂ©e Ă  liquider le dĂ©partement [de Seine-InfĂ©rieure] de ses Juifs », voir F. Bottois, op. cit., p. 211-227. [32] Sources F. Bottois, op. cit. ; ADSM, 3352W2 ; CDJC/MĂ©morial de la Shoah. Anna et Clara Burstin apparaissent comme mortes en dĂ©portation au JORF du arrĂȘtĂ© du Leur date officielle de dĂ©cĂšs est le 18 fĂ©vrier 1943 il s’agit d’une date prĂ©sumĂ©e 5 jours aprĂšs le dĂ©part du convoi, Ă©tablie par les services de l’état civil de Rouen en 1963. Voir DAVCC, AC21P431976 dossier Anna Burstin. [33] Ibid. [34] DAVCC, AC21P431978. [35] On retrouve les noms de Samuel Burstein, Polonais, et Ginette Burstein [sic] sur une liste de civils de Limoges dĂ©portĂ©s ou torturĂ©s, avec la date du et la mention de la Gestapo CDJC, CCXV-43. [36] Information de B. Pommaret. Sources ADHV, 646W187 et 986W540. [37] DAVCC, AC21P719928. [38] Voir B. Reviriego, Les Juifs en Dordogne, op. cit., p. 240-242, 305 ; notice Burstin Osias par Bernard Reviriego, version mise en ligne le derniĂšre modification le ; notice Sainte-Marie-de-Chignac Dordogne, 27 mars et 1er avril 1944 par Bernard Reviriego, Dominique Tantin, version mise en ligne le derniĂšre modification le Sur ce massacre et l’implication de la division Brehmer dans la politique gĂ©nocidaire, voir aussi l’article Aktion Brehmer », [39] Voir la stĂšle et la nouvelle plaque de 2019, [40] DAVCC, AC21P431978, bulletin Ă©tabli le Information confirmĂ©e par B. Reviriego dans un Ă©change avec l’auteure. [41] Voir les documents contradictoires dans les fonds de la DAVCC et du CDJC dont il n’est pas toujours possible de connaĂźtre l’origine, notamment l’erreur en LVII-30. Sur deux autres listes LVII-17 et LVII-69 Ă©manant d’autoritĂ©s de Dordogne, Osta [sic] Burstin, de nationalitĂ© polonaise, ou Burstino [sic] Osias, domiciliĂ© Ă  Limoges, est bien considĂ©rĂ© comme exĂ©cutĂ© en Dordogne le sur la liste LVII-69, il figure, plus prĂ©cisĂ©ment, parmi les victimes du massacre de Sainte-Marie-de-Chignac. En CCXV-44, ce qui a pu prĂȘter Ă  confusion, il apparaĂźt sur une liste des personnes fusillĂ©es aprĂšs avoir Ă©tĂ© dĂ©tenues Ă  la prison de Limoges ». Le la mairie de Limoges Ă©tablit mĂȘme un acte de dĂ©cĂšs Ă  son nom AC21P431978. [42] DAVCC, AC21P719928. [43] MĂ©morial de la Shoah, base des victimes, extrait de la liste du convoi 71. [44] On connaĂźt cette date par des tĂ©moins, comme Simone Veil. Elle figure aussi, pour l’arrivĂ©e de Ginette au camp, sur une liste de survivants d’Auschwitz, voir note 47. [45] Entretien tĂ©lĂ©phonique avec l’auteure, [46] RĂ©ponse du des archives du musĂ©e d’Auschwitz, sur la base de diffĂ©rents documents post-libĂ©ration. [47] Arolsen Archives Online-Collections, List of French in CC Auschwitz, 8005303. [48] DAVCC, AC21P719928. [49] Informations communiquĂ©es par Robert Mencherini, ancien professeur des universitĂ©s, d’aprĂšs les Archives dĂ©partementales des Bouches-du-RhĂŽne et la presse locale. Voir aussi son livre, La LibĂ©ration et les annĂ©es tricolores 1944-1947, tome 4 de Midi rouge, ombres et lumiĂšres. Une histoire politique et sociale de Marseille et des Bouches-du-RhĂŽne de 1930 Ă  1950, Paris, Syllepse, 2014, ici p. 214-218. [50] Information de B. Pommaret. Source ADHV, 11J4. [51] DAVCC, AC21P431978. [52] Information de B. Pommaret. Source ADHV, 47J3. [53] DAVCC, AC21P431976/AC21P431977. Linda Ganon et ses deux filles, qui ont Ă©chappĂ© Ă  la dĂ©portation grĂące Ă  un mĂ©decin qui les a cachĂ©es, habitaient au 41 rue Victor Hugo Ă  Rouen oĂč la police Ă©tait venue les arrĂȘter en mĂȘme temps que leurs voisines. [54] Dans un courrier adressĂ© en 2001 au MĂ©morial de la Shoah pour demander l’inscription de Ginette sur le Mur des Noms, Pauline Schmied nĂ©e Ganon, aujourd’hui dĂ©cĂ©dĂ©e, supposait mĂȘme qu’elle Ă©tait partie dĂšs 1945 aux USA information communiquĂ©e par ValĂ©rie Kleinknecht. Gaby, quant Ă  elle, n’a pas oubliĂ© cette visite de Ginette Burstin, mais elle n’en a malheureusement plus de souvenirs prĂ©cis. Entretien tĂ©lĂ©phonique avec Gaby Bardavid nĂ©e Ganon, [55] Arolsen Archives Online-Collections, 03010301 oS, Index Card, AJDC, Émigration Service Paris. [56] DAVCC, AC21P719928. [57] Pour une synthĂšse de ses Ă©tapes et de sa mise en Ɠuvre, voir Jacques Fredj, Les Juifs de France dans la Shoah, Paris, Gallimard / MĂ©morial de la Shoah, 2011. [58] F. Bottois, op. cit., p. 299, et p. 302-303 pour l’évocation des survivants. Pour citer ce texte Corinne Bouillot, “La famille Burstin de Rouen, victime de la Shoah mĂ©thodes et rĂ©sultats d’une recherche documentaire”, dans L'Atelier des Savoirs, 7 novembre 2020, ConsultĂ© le 16 aoĂ»t 2022.

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UNE ENTREPRISE PUBLIQUE DANS LA GUERRE LA SNCF, 1939-1945 TroisiĂšme partie Les cheminots dans la guerre et l’occupation Yves Machefert-Tassin – Le bilan des bombardements aĂ©riens des installations ferroviaires en France, leurs consĂ©quences stratĂ©giques et humaines tactiques incohĂ©rentes, rĂ©sultats discutables, victimes civiles exorbitantes et destructions Ă  long terme inutiles ? L’histoire du bombardement aĂ©rien des voies ferrĂ©es depuis la guerre 1914-1918 a pour rĂ©sultat, en 1940, une stagnation Ă©vidente et bien peu de moyens du cĂŽtĂ© des AlliĂ©s1. En revanche, la campagne de France allemande de mai 1940 prouve l’efficacitĂ© relative et la prĂ©cision des bombardements en piquĂ© Stukas ou 342 Junker 87 B, sur des objectifs de faibles dimensions, dont les installations ferroviaires fixes et mobiles. En consĂ©quence, le nombre de victimes civiles ou cheminotes est, pour cette campagne, fort rĂ©duit. Avant mĂȘme l’armistice, la rĂ©plique britannique en est le bombardement Ă  basse altitude, encore localisĂ©, des ports du Nord de la France et des voies de dessertes impliquĂ©s dans le rassemblement des barges prĂ©vues pour un Ă©ventuel dĂ©barquement allemand en Angleterre. Les premiĂšres installations du rail ainsi touchĂ©es par le Bomber Command de la RAF sont celles de Boulogne-sur-Mer dĂšs le 12 juin 1940, puis Calais, Dunkerque et Saint-Omer de 1940 Ă  19422. Cependant, lors de la campagne de mai-juin 1940, le rĂ©seau français n’avait Ă©tĂ© atteint que par des destructions mineures, ne touchant pas les ouvrages stratĂ©giques. La reconstruction, entreprise fin 1940, est achevĂ©e en 1942 pour 2 100 d’entre eux. Quelques ouvrages majeurs entiĂšrement reconstruits, tel Longeray sur le RhĂŽne, ont Ă©tĂ© Ă©pargnĂ©s par la suite en 1944, tant par l’aviation que par le minage et, Ă  l’inverse, certains, Ă©pargnĂ©s en 1940, ont Ă©tĂ© dĂ©truits par les Allemands en retraite lorsqu’ils en avaient le temps, comme dans le Nord et l’Est de la France. La difficultĂ© d’ “ asphyxier ” un adversaire par l’interruption du trafic qui le ravitaille n’est donc apparue qu’aprĂšs bien des Ă©checs. Ce n’est que bien aprĂšs 1945 que les militaires ont constatĂ© l’incohĂ©rence entre les moyens aĂ©riens qu’ils avaient dĂ©veloppĂ©s dans un but de guerre totale, de bombardements de terreur sur les zones urbaines allemandes et la faiblesse des rĂ©sultats obtenus quand ils Ă©taient appliquĂ©s aux objectifs prĂ©cis, spĂ©cifiques que sont les voies de communication, surtout ­ferrĂ©es. 1940-1943 UN ÉCHEC STRATÉGIQUE À la suite des raids aĂ©riens allemands de fin 1940 Ă  dĂ©but 1941 sur les docks de Londres, puis sur des villes industrielles britanniques, en particulier sur les usines d’aĂ©ronautique Rolls Royce Ă  Coventry, par exemple, arrĂȘtĂ©s par la bataille d’Angleterre oĂč s’illustre la chasse anglaise, une contre-attaque est lancĂ©e aussitĂŽt vers le continent. Les opĂ©rations sont locales, menĂ©es de jour et sur la zone cĂŽtiĂšre de la Manche par des bombardiers moyens, lĂ©gers et rapides bimoteurs Maraudeurs et Mosquitos. Les objectifs visĂ©s, lorsqu’ils sont ferroviaires, vont des ouvrages d’art, tel le viaduc de Morlaix, Ă  l’ouest 29 janvier 1943, 39 morts civils, Ă  quelques installations du Nord, telles Abbeville, Saint-Omer, et jusqu’à Amiens et Tergnier attaquĂ©s d’avril 1942 Ă  juillet 1943. Devant le peu de rĂ©sultats de ces raids lĂ©gers dits “ tactiques ”, le Bomber Command “ lourd ” reprend les opĂ©rations, qu’il conforme Ă  sa pratique des arrosages “ punitifs ” de grandes surfaces, comme sur les villes allemandes, puisque selon son propre chef, Harris, “ c’est la seule chose qu’ils sachent faire ”3. Ajoutons que cette dĂ©cision du cabinet de guerre britannique, qui est essayĂ©e d’avril 1942 au 8 mars 1943 sur 29 objectifs ferroviaires en France, est dĂ©jĂ  contestĂ©e par les AmĂ©ricains de l’US Air Force arrivant en Grande-Bretagne pour Ă©tablir leurs propres bases d’attaques aĂ©riennes. Mais leurs dĂ©buts se rĂ©vĂšlent dĂ©sastreux Rennes-triage, le 8 mars 1943, 10 % d’impacts sur le site SNCF et 300 morts civils, ou Rouen-Sotteville et, pour servir la vanitĂ© d’Ira Eaker et de sa 8e USAF, les essais infructueux de coupure de la liaison vers l’Italie Marseille-Vintimille, par des attaques multiples du viaduc d’AnthĂ©or. Il faudra 6 expĂ©ditions successives Ă  partir de 1943, relayĂ©es par la RAF tout aussi malhabile, pour finir par encadrer le viaduc d’Agay, pris pour celui d’AnthĂ©or le 12 fĂ©vrier 1944 ! Si, au sol, les dĂ©gĂąts civils sont relativement minimes, il en est de mĂȘme du point de vue ferroviaire, puisque quelques cratĂšres sur la voie interrompent seulement de quelques heures Ă  quelques jours une liaison majeure germano-italienne. De tels rĂ©sultats conduisent Ă  l’abandon de toute idĂ©e d’attaques sur les ouvrages d’art. Il sont trop difficiles Ă  atteindre par les bombardiers lourds Ă  haute altitude et l’on ne pense pas Ă  dĂ©velopper les attaques en piquĂ© en utilisant les bimoteurs rapides existants. Qu’en est-il de la dĂ©fense passive des installations de la SNCF ? Si les AlliĂ©s n’ont dĂ©veloppĂ© leurs moyens de bombardement qu’à partir de 1943, en revanche le continent avait renforcĂ© ceux de sa dĂ©fense passive depuis 1939 et, parfois, dĂšs 1937. En France, avant mĂȘme la crĂ©ation de la SNCF en 1937, les autoritĂ©s militaires demandent aux rĂ©seaux d’effectuer des “ travaux de protection des carrefours ferroviaires contre les attaques aĂ©riennes, car ils sont essentiels pour la continuitĂ© des transports militaires ”. C’est ainsi que des installations importantes sont pourvues, en 1938 et 1939, d’abris bĂ©tonnĂ©s d’urgence, enterrĂ©s ou en surface, gĂ©nĂ©ralement de petite surface 4 Ă  20 mÂČ, soit pour 4 Ă  20 hommes. Le toit, d’environ 1 m Ă  1,5 m d’épaisseur, ne peut rĂ©sister qu’aux bombes explosives de 300 kg considĂ©rĂ©es comme le maximum de l’époque ! ; en revanche, ces abris sont Ă©quipĂ©s le plus souvent pour rĂ©sister aux attaques chimiques par gaz de combat. Des variantes, abris simplifiĂ©s dits individuels, prĂ©fabriquĂ©s, Ă  toiture conique, aussi bien que des abris plus importants, pour 20 Ă  40 personnes, sur les sites oĂč la main-d’Ɠuvre est plus nombreuse bĂątiments administratifs, ateliers, apparaĂźtront de 1939 Ă  19444. Les consĂ©quences des tergiversations de la RAF et de l’USAF et le rapport “ Butt ” Les rĂ©sultats dĂ©sastreux des attaques aĂ©riennes de jour Ă  haute altitude de l’USAF en 1943, mĂȘme si la chasse adverse est faible, conduisent la RAF Ă  essayer de son cĂŽtĂ© quelques raids de jour, avec des bombardiers moyens et rapides accompagnĂ©s de chasseurs jusqu’à ce que la maĂźtrise de l’air sur la Manche leur soit assurĂ©e. En principe complĂ©mentaires des raids “ lourds ” de nuit, ils concernent des objectifs ferroviaires trĂšs divers, comme Ă  Caen 10 fĂ©vrier 1943 puis Ă  Tours fĂ©vrier 1943 oĂč interviennent des formations de Mosquitos Ă  trĂšs basse altitude. Devant le peu de rĂ©sultats obtenus, la RAF revient aussi aux bombardiers lourds sur Modane 17 septembre et 11 novembre 1943 avec non moins de 340 appareils. Ici encore les rĂ©sultats sont ambivalents, sinon nuls interruptions de circulation allant de un Ă  quatre jours, au prix de nombreuses vies humaines, tant cheminotes que civiles, et d’équipages5. Le comble est atteint avec le raid avortĂ© de 548 appareils du 5 dĂ©cembre 1943, dont 3 seulement trouvent l’une de leurs multiples cibles, au coĂ»t de 9 appareils disparus pour rien. À la suite de ces rĂ©sultats qui commencent Ă  se savoir, Churchill demande un rapport “ civil ” qui porte le nom de son auteur principal “ D. N. Butt ”, basĂ© sur les rĂ©sultats des raids de nuit de toutes catĂ©gories mais principalement sur l’Allemagne. Ses conclusions sont d’une sĂ©vĂ©ritĂ© sans appel pour le Bomber Command britannique. Elles rĂ©vĂšlent les dĂ©fauts de principe d’une stratĂ©gie qui consiste en flux opĂ©rationnels longs, de ce fait trĂšs risquĂ©s pour les derniers avions, ainsi que l’inefficacitĂ© complĂšte du Carpet bombing “ en tapis ” ou “ de surface ” , d’une dispersion et d’une imprĂ©cision faciles Ă  constater sur les reconnaissances photographiques postĂ©rieures malgrĂ© la prĂ©cision des “ marquages ”6. Churchill, dĂ©but 1943, se pose donc sĂ©rieusement la question continuer ou arrĂȘter ? La question d’éthique des reprĂ©sailles de terreur sur des objectifs civils n’est guĂšre abordĂ©e, bien que les voix de quelques lords et de l’évĂȘque de Chichester s’élĂšvent en ce sens. Churchill est presque contraint par l’état-major de la RAF qui n’a aucun autre moyen d’attaque, et en l’absence d’alternative disponible que seraient des chasseurs-bombardiers lĂ©gers et rapides, de persister dans la voie de l’ “ ar­rosage ” nocturne, approximatif, “ de surface ”. Harris “ the Bomber ” gagne ainsi le maintien officiel de l’espoir d’atteindre le moral des troupes par la destruction des maisons et par la “ terreur des familles ”. Mais il atteint aussi ses Ă©quipages, qui dĂ©couvrent que la DCA n’est pas rĂ©servĂ©e Ă  des zones militaires quasi inaccessibles comme la base de Cherbourg, presque jamais attaquĂ©e. L’ANNÉE 1944 Les grandes opĂ©rations prĂ©paratoires au dĂ©barquement mars Ă  juin 1944 Quel est exactement le plan alliĂ© ? Le gĂ©nĂ©ral Eisenhower le prĂ©cise “ C’est la dislocation des lignes de communications ennemies sur une zone bien plus Ă©tendue que la rĂ©gion mĂȘme du dĂ©barquement [
]. Durant la pĂ©riode de prĂ©paration, soit seulement en mai 1944, des forces aĂ©riennes tac­tiques seront utilisĂ©es contre les objectifs ferroviaires. ” Cela n’est pas du goĂ»t du Bomber Command Harris car ces forces aĂ©riennes tactiques reprĂ©sentent environ 2 400 chasseurs ou chasseurs-bombardiers et 700 bombardiers lĂ©gers alors qu’existaient dĂ©jĂ  4 000 bombardiers lourds. Par ailleurs, ce n’est pas de gaietĂ© de cƓur que le gĂ©nĂ©ral Eisenhower se dĂ©cide Ă  dĂ©truire le systĂšme des communications françaises, dont il espĂšre bien pouvoir se servir, Ă  son tour, pour progresser vite, alors que F. D. Roosevelt y Ă©tait indiffĂ©rent7. “ Je me rendais compte, Ă©crit-il, que les attaques contre les gares de triage et les centres ferroviaires par les forces stratĂ©giques et tactiques entraĂźneraient de nombreuses pertes de vies françaises. En outre, une trĂšs importante part de l’économie française serait incapable de fonctionner pendant un laps de temps considĂ©rable [
]. NĂ©anmoins, pour des raisons purement militaires, j’ai considĂ©rĂ© que le systĂšme des communications françaises devait ĂȘtre disloquĂ©. ” Et il obtient gain de cause, cette fois, contre Churchill qui craignait des rĂ©actions justifiĂ©es8. Reportons-nous en mars 1944. Ce qu’il faut obtenir, c’est “ l’encagement du champ de bataille ”. Les Ă©tats-majors allemands, mais non la Luftwaffe, sont persuadĂ©s que l’invasion se fera par le Pas-de-Calais. Ils y ont maintenu et concentrĂ© la 15e ArmĂ©e, tandis qu’en Normandie ils n’ont groupĂ© que dix divisions, dont une blindĂ©e. Les AlliĂ©s doivent donc empĂȘcher la 15 e ArmĂ©e et les autres rĂ©serves de se dĂ©placer vers la Normandie durant les opĂ©rations ou du moins retarder leur progression et maintenir les Allemands dans le doute sur le lieu du dĂ©barquement, tout en coupant l’accĂšs aux installations de V1 et V2 qui viennent d’ĂȘtre identifiĂ©es. La campagne s’ouvre, en mars 1944, par des bombardements sur le rĂ©seau ferroviaire du Nord-Ouest de l’Europe. L’état-major de l’Air alliĂ© a Ă©tabli l’ordre de prioritĂ© suivant 1 / ponts principaux ; 2 / nƓuds ferroviaires et installations – dĂ©pĂŽts, plaques tournantes [sic], – postes d’aiguillage, – commande-signaux [sic], – gares de triage ; 3 / trains mitraillage. À partir de la mi-avril, les bombardiers des forces aĂ©riennes stratĂ©giques abandonnent les objectifs lointains allemands pour concentrer leurs attaques sur les rĂ©seaux ferroviaires français et belge. Les points visĂ©s sont en premier lieu LiĂšge, Namur, Mons, Charleroi, Arras, d’une part, les gares de triage de la rĂ©gion parisienne, d’autre part. Le commandement alliĂ© a, en outre, prĂ©vu l’établissement d’une “ ligne d’interdiction ” par la rupture des ponts sur la Seine entre Paris et Le Havre. À partir du 27 mars, ce plan entre en application. Afin de tromper les Allemands sur le lieu de dĂ©barquement, cette premiĂšre ligne d’interdiction est bientĂŽt doublĂ©e d’une seconde qui longe le canal Albert et la Meuse. L’attaque des objectifs ferroviaires et routiers doit atteindre son paroxysme au mois de mai. Elle porte sur quatre secteurs distincts — entretien des destructions sur la ligne LiĂšge, Mons, Arras et attaques dans le quadrilatĂšre Rouen, Paris, MĂ©ziĂšres, Dunkerque servant aussi d’accĂšs aux installations V1 et V2 ; — rupture des ponts routiers et ferroviaires sur la Meuse et la Seine ; — bombardements sur les centres ferroviaires de l’Allemagne occidentale Hamm, Aix-la-Chapelle, TrĂšves, Mannheim, du Luxembourg et de l’Est de la France Épinal, Thionville, Belfort, Mulhouse, Strasbourg ; — attaques des installations ferroviaires dans la rĂ©gion de la Loire OrlĂ©ans, Tours, Nantes, Saumur et dans le Sud-Est de la France Nice, Avignon, NĂźmes. On note, cependant, que ce programme fait l’objet de vives controverses, trĂšs directes, entre les principaux responsables anglais et amĂ©ricains, y compris entre Churchill et Eisenhower. HĂ©sitations tactiques et rĂ©sultats La conception amĂ©ricaine du bombardement dit “ de prĂ©cision ” parce qu’il Ă©tait supposĂ© devoir atteindre son but, Ă  haute altitude et de jour, en formation serrĂ©e et sans escorte, est vite rĂ©duite Ă  nĂ©ant par la chasse de la Luftwaffe. Outre les effets des attaques sur le moral des civils touchĂ©s, elle entraĂźne des pertes excessives en appareils et Ă©quipages en octobre 1943, un tiers du 8e Bomber Command USAF fut dĂ©truit en une semaine. La RAF reprend alors des opĂ©rations nocturnes, relayant ou remplaçant l’USAF. Jusqu’en juin 1944, les opĂ©rations menĂ©es par les deux armĂ©es de l’air concurrentes sont entiĂšrement distinctes, la coordination ne venant qu’aprĂšs le dĂ©barquement ! Ce qui ne suffit pas Ă  expliquer certaines incohĂ©rences des raids ferroviaires. À quoi aboutissent ces dĂ©bats, vus du rail et du sol, dans la rĂ©alitĂ© des faits ? En fĂ©vrier-mars 1944, les Anglais doivent renforcer, sous le nom de leurre de Fortitude, leur protection contre les armes de reprĂ©sailles en cours d’ins­tallation au Nord-Ouest de la France. Un dĂ©barquement en Pas-de-Calais de­vient incertain. Ils doivent aussi assurer avec les AmĂ©ricains la prĂ©paration de la tenaille d’Overlord entre Seine et Loire. La rĂ©ponse Ă  ces obligations tient dans les premier raids aĂ©riens massifs sur les cibles ferroviaires dĂ©signĂ©es par le nom, gĂ©nĂ©rique, de “ triages ” français, regroupant 80 installations de la SNCF aussi diverses, en dehors des triages eux-mĂȘmes, que faisceaux de garage, ateliers d’entretien du matĂ©riel roulant, dĂ©pĂŽts de locomotives, mais aussi gares de marchandises, bifurcations, ensuite seulement les ouvrages d’art. Cette premiĂšre vague de prĂ©paratifs pour Overlord est censĂ©e brouiller les pistes et Ă©viter de dĂ©voiler les vĂ©ritables zones choisies pour le dĂ©barquement. L’offensive commence par “ 27 triages ”. AprĂšs les essais prĂ©cĂ©dents, regrettables Ă  tous points de vue, y compris leur inutilitĂ©, qui ont marquĂ© 1943, c’est Le Mans-triage qui dĂ©bute la sĂ©rie en mars 1944. Bien que l’objectif soit rĂ©putĂ© facile Ă  atteindre parce que les habitations sont Ă©loignĂ©es, que la dĂ©fense au sol et la chasse allemande sont rĂ©duites, le succĂšs reste douteux9. Les destructions ferroviaires utiles Ă  court terme du point de vue militaire sont presque nulles, les relevĂ©s aĂ©riens le prouvent dans ce cas comme dans les suivants. De ce fait, la rĂ©pĂ©tition de ces raids lourds devient impossible Ă  Ă©viter. Comme ils sont difficiles Ă  organiser, donc espacĂ©s en temps, la reconstruction partielle des itinĂ©raires de voies essentielles peut ĂȘtre menĂ©e Ă  bien entre deux raids, ce qui ne gĂšne guĂšre les transports militaires, sinon en ralentissant de quelques jours les ravitaillements. Curieusement, Ă  la mĂȘme Ă©poque, des raids extrĂȘmement prĂ©cis sont lancĂ©s contre les stations de radars allemands 40 sur 47, dispersĂ©s de Cherbourg Ă  la Belgique, dans le but d’entretenir la confusion sur les zones de dĂ©barquement. EffectuĂ©s par des chasseurs-bombardiers Typhoon ou Spitfire, ou Mosquitos parfois pourvus de fusĂ©es-bombes, ils se rĂ©vĂšlent extrĂȘmement efficaces et peuvent se rĂ©pĂ©ter et harceler l’adversaire sans risques majeurs. Quoique la rĂ©sistance française et belge connaisse, approuve et aide ces opĂ©rations, il ne semble pas, Ă  cause du cloisonnement et des luttes intestines entre Ă©tats-majors, que l’on ait pensĂ© Ă  les utiliser contre les voies ferrĂ©es avant plusieurs mois. En ce qui concerne les attaques de trains, les cheminots n’y Ă©taient guĂšre prĂ©parĂ©s ils connaissaient leurs risques, mais ne soupçonnaient pas encore l’absence de discernement des attaquants qui allaient confondre convois militaires et civils, voies normales et voies Ă©troites. Quant aux bombardements de gares, ils n’étaient pas plus efficaces dans le cas de 30 % des objectifs atteints, la SNCF pouvait remettre en service des voies de traversĂ©e en quelques heures, sinon en quelques jours en dĂ©pit des bombes Ă  retardement. Ces constats sont valables pour tous les raids de mars Ă  juillet 1944, car, malgrĂ© les perfectionnements du ciblage par radar H2S notamment, les radios de bord et d’identification IFF sont trop bavardes, et permettent aux radars allemands de diriger avec plus de prĂ©cision la chasse nocturne. Celle-ci est pourvue, dĂšs fĂ©vrier 1944, de radars de pistage prĂ©cis SN2 qui Ă©quipent 480 appareils JU88 et ME110 en avril et de nouveaux canons obliques qui tiennent compte des angles morts des bombardiers britanniques. S’ensuivent des pertes atteignant, selon l’aveu mĂȘme des Anglais, une “ quantitĂ© presque insupportable ”, qui vont durer jusqu’à la mise en service des chasseurs d’accompagnement Ă  grand rayon d’action type P51 Mustang permettant aux AmĂ©ricains de prendre le relais des raids diurnes en juin-juillet. Mais auparavant, bien des citĂ©s cheminotes, voisines des objectifs “ rail ”, comptent des destructions d’habitations considĂ©rables. Bien que les familles se dispersent, la nuit, loin des cibles, il y a encore trop de victimes civiles. Citons les exemples de Tergnier, Aulnoye, Laon, Lens ou Lille-DĂ©livrance au nord, en rĂ©gion parisienne Vaires10, Villeneuve-Saint-Georges, Juvisy et Trappes ; plus Ă  l’ouest et au sud, Rouen-Sotteville, Le Mans, Saint-Pierre-des-Corps et Les Aubrais. Les comptes rendus d’observations des rĂ©sultats des Ă©quipages alliĂ©s en fin de mission se signalent par leur optimisme, exagĂ©rĂ© comme le rĂ©vĂšlent les photos aĂ©riennes prises ensuite, dĂ» surtout aux faibles pertes qui caractĂ©risent les objectifs ferroviaires Ă  cette Ă©poque 1,1 Ă  1,5 % des appareils. À l’opposĂ©, cĂŽtĂ© SNCF, la tendance des rapports, qu’ils soient ou non officiels, et prĂ©vus pour des usages multiples, est aussi d’amplifier les dĂ©gĂąts – il s’agit d’éviter la rĂ©pĂ©tition des bombardements et les prĂ©lĂšvements de matĂ©riel intact – tout en Ă©valuant assez justement les temps de remise en Ă©tat des voies principales. La SNCF peut ainsi rĂ©clamer un maximum de matiĂšres et de matĂ©riels de remplacement aux occupants11 en arguant des longueurs totales de voies atteintes par les bombes, alors que le rapport entre voies nĂ©cessaires Ă  la continuitĂ© du rĂ©seau et voies de garage est de 1 Ă  10, voire de 1 Ă  20. La multiplication des objectifs et leur importance entraĂźne une montĂ©e trĂšs rapide des effectifs employĂ©s sur les chantiers de remise en Ă©tat, cheminots et civils de diverses provenances. Ils passent de 4 000 en avril Ă  plus de 15 000 courant mai au rĂ©seau Nord, de 3 000 Ă  7 ou 9 000 Ă  l’Ouest. Le total atteindra 65 000 pour toute la SNCF. La RĂ©sistance est consciente de cette augmentation du nombre de victimes potentielles alors que l’état-major aĂ©rien britannique ne la prend que peu en compte. Dans tous les cas il n’est pas en mesure de changer rapidement de tactique, alors qu’Overlord se profile dans moins de trois mois. On constate alors que sur 26 attaques aĂ©riennes majeures, impliquant 4 264 bombardiers et le lĂącher de 15 290 t de bombes, explosives pour la plupart, 15 Ă  25 % selon le succĂšs du raid atteignent leurs objectifs, au sens large. Les pertes en avions, qui restent beaucoup plus Ă©levĂ©es sur l’Allemagne, oĂč est concentrĂ©e la majoritĂ© des dĂ©fenses, restent trĂšs faibles sur les objectifs ferroviaires français 1,5 Ă  2,3 % du nombre d’appareils, ce qui reprĂ©sente nĂ©anmoins plus de 1 000 manquants, morts, prisonniers ou disparus cĂŽtĂ© AlliĂ©s, davantage amĂ©ricains que britanniques. À la veille du D Day, les observateurs voient pour un rare moment correspondre le taux estimĂ© de “ coups au but ” Ă  la rĂ©alitĂ©. C’est au prix de la mort de prĂšs de 2 000 civils et cheminots et de la destruction de 14 000 maisons ou immeubles. DU BILAN PROVISOIRE DU 6 JUIN 1944 AU BILAN DÉFINITIF Retarder les transports allemands Le “ prix ” humain Ă  payer est alors considĂ©rĂ© par les Britanniques comme infĂ©rieur aux prĂ©visions, mais les rĂ©sultats des opĂ©rations le sont aussi ils jugent qu’elles ne sauraient retarder suffisamment les renforts allemands. C’est pourquoi on passe en juin 1944 Ă  des opĂ©rations tactiques, ponctuelles, concernant davantage les ouvrages d’art que les voies elles-mĂȘmes comme les observateurs au sol le demandaient depuis longtemps. Le rendement global du systĂšme ferroviaire français contrĂŽlĂ© par l’Allemagne tombe assez bas pour que le ravitaillement de l’armĂ©e et de l’organisation Todt rencontre des difficultĂ©s considĂ©rables pour parvenir d’Allemagne en France, alors que le trafic est encore trĂšs actif Ă  la Deutsche Reichsbahn. Les mouvements de troupes postĂ©rieurs Ă  l’invasion du 6 juin subissent des retards importants et des dĂ©routements de plusieurs centaines de kilomĂštres sont imposĂ©s aux troupes en cours de transport par rail12. En fĂ©vrier 1944, l’ensemble de l’organisation des transports allemands en France reprĂ©sente un trafic de 60 Ă  70 trains par jour circulant entre l’Allemagne et les cĂŽtes françaises de Dunkerque Ă  Nantes. À la fin d’avril, il ne passe plus que 48 trains par vingt-quatre heures. Fin mai, le trafic tombe Ă  32 par jour dont 12 convois de charbon sarrois 20 trains seulement restent disponibles pour la troupe, ce qui suffit en certains cas pour acheminer les renforts. Ici encore, ce ne sont pas les attaques des gares et du matĂ©riel qui ont Ă©tĂ© efficaces, mais les goulets d’étranglement provoquĂ©s et, surtout, entretenus sur la Seine et la Loire par les attaques des ouvrages d’art. Autres objectifs, qui poursuivent des buts tactiques, sont les mitraillages de convois, bombardements de pleine voie et de petites gares oĂč sont dispersĂ©s les matĂ©riels les reconnaissances aĂ©riennes ont permis aux observateurs de reconnaĂźtre enfin que le matĂ©riel roulant “ sensible ” trains-parcs, trains de secours13, et surtout locomotives avait Ă©tĂ© dispersĂ© pour le sauver des destructions massives des “ nƓuds ” ferroviaires14. L’USAF recommande donc des opĂ©rations multiples et dispersĂ©es, diurnes, Ă  basse altitude plutĂŽt que l’énorme gaspillage de moyens que reprĂ©sentent des raids nocturnes “ en surface ”. Cependant les premiers essais amĂ©ricains Ă  partir des bases britanniques, puis ceux depuis l’Afrique du Nord vers la Provence, effectuĂ©s Ă  moyenne altitude pour protĂ©ger les appareils, sont tout aussi peu efficaces, qu’ils s’agisse de leurs rĂ©sultats militaires Ă  court terme ou des destructions et pertes de vies civiles. L’incomprĂ©hension des motifs des actions aĂ©riennes domine chez les ­cheminots, alors qu’on dĂ©nombre Ă  l’étĂ© 16 600 logements SNCF atteints dont 6 800 sont irrĂ©parables comment les AlliĂ©s articulaient-ils destruction matĂ©rielle Ă  long terme et action militaire Ă  court terme ? Bien qu’ils soient frĂ©quemment rĂ©sistants ou qu’ils appuient la RĂ©sistance, et en contact avec Londres, les cheminots rĂ©agissent brutalement aux bombardements alors qu’ils se mobilisent pour rĂ©unir des informations Ă  propos des armes secrĂštes V1 Ă  V3 et des lignes ferroviaires qui permettent leur approvisionnement, ce qui est aussi risquĂ© pour eux. Les actions tactiques complĂ©mentaires Depuis 1942, d’autres actions localisĂ©es ont Ă©tĂ© menĂ©es par des formations plus lĂ©gĂšres, mitraillages ou tentatives pour endommager les installations Ă©lectriques fournissant Ă©nergie et courant de traction. Citons, Ă  titre anecdotique, le lĂącher, dĂ©but 1943, de groupes de ballonnets sphĂ©riques traĂźnant des filins d’acier. LancĂ©s depuis la Grande-Bretagne par vent nord-ouest favorable, ils Ă©taient censĂ©s provoquer des courts-circuits des lignes Ă  haute tension, voire des ruptures. Les rĂ©sultats Ă©tant ridicules par rapport aux moyens mis en Ɠuvre, les AlliĂ©s en reviennent, Ă  l’étĂ© 1943, aux opĂ©rations aĂ©riennes clas­siques contre des postes haute tension et des sous-stations. La consommation mensuelle d’énergie haute tension de la SNCF reste la mĂȘme jusqu’en mars-avril 1944 et ne chute vraiment, dans un rapport de 10 Ă  1, que de juin Ă  octobre 1944. Les destructions sont moins en cause que la rĂ©duction dĂ©libĂ©rĂ©e des circulations de trains Ă©lectriques. La part des actions sur les postes ou sous-stations l’emporte sur celle des opĂ©rations aĂ©riennes dans les destructions totales, qui restent faibles15. Seule exception, peu comprĂ©hensible, les installations Ă©lectriques de la ligne Paris-Le Mans sont visĂ©es dĂšs le 18 avril 1943 par 650 bombes qui tombent autour des 4 sous-stations successives de Chartres au Mans, dont 2 seulement sont touchĂ©es. La SNCF tire de cet Ă©chec relatif des conclusions qui ne semblent guĂšre comprises Ă  Londres, Ă  savoir la dispersion, pour les mettre en rĂ©serve, de tous les seconds groupes Ă©lectriques et du matĂ©riel alors difficile Ă  rĂ©approvisionner. C’est Ă  la suite des incessantes attaques des sous-stations de pleine ligne Ă  partir d’avril 1944 jusqu’à 8, plus 5 mitraillages Ă  CondĂ©-sur-Huisne d’avril Ă  juillet 1944 et des coupures de catĂ©naires que la SNCF rĂ©duit la traction Ă©lectrique sur cette ligne de mai Ă  fin aoĂ»t, entraĂźnant un ralentissement opportun du trafic, y compris militaire. En revanche, sur le rĂ©seau Sud-Ouest, moins systĂ©matiquement visĂ©, bien que les postes d’interconnexion “ Nord ” de Chevilly et de Chaingy aient Ă©tĂ© mis en partie hors service dĂšs le 3 octobre 1943 le courant est coupĂ© quelques heures entre Juvisy et les Aubrais, la traction Ă©lectrique est maintenue et la rĂ©paration des catĂ©naires prĂ©cĂšde souvent la rĂ©fection des voies. AprĂšs le 6 juin, les cheminots voient bien l’intĂ©rĂȘt de paralyser, momentanĂ©ment et sans prĂ©avis, ou parfois dĂ©finitivement, la traction Ă©lectrique des lignes susceptibles d’amener des renforts en Normandie, Ă  condition de ne pas apporter de dĂ©gĂąts irrĂ©mĂ©diables aux installations. Il fallait adapter les mé­thodes de sabotage, aviser la rĂ©sistance extĂ©rieure au rail et l’aviation alliĂ©e de cette rĂ©serve. Il Ă©tait suggĂ©rĂ© Ă  Londres, pour permettre la reprise rapide du trafic plus tard, de ne plus recourir aux bombardements aĂ©riens aveugles sur les installations de traction Ă©lectrique. RĂ©parer, reconstruire Afin de prĂ©venir de nouveaux dĂ©gĂąts et prĂ©voir l’avenir, tout en essayant de s’assurer des rĂ©serves de matĂ©riel “ sensible ” ou difficile Ă  renouveler, la SNCF dĂ©cide, dĂšs 1943, de crĂ©er 24 “ trains-parcs ” constituĂ©s d’équipes de districts Voie, de stocks de secours et de matĂ©riel de dĂ©pannage, de matĂ©riaux empruntĂ©s aux rĂ©serves allemandes bien connues des cheminots. 135 000 journĂ©es d’agents affectĂ©s aux trains-parcs sont utilisĂ©s pour la seule RĂ©gion Ouest dĂšs 1943. Ils remplacent cette annĂ©e-lĂ  60 000 traverses et prĂšs de 100 km de rails sur un total de 150 000 traverses et 186 km de rails pour l’ensemble du rĂ©seau. Les Ă©quipes sont prĂȘtes pour 1944, mais sans se douter encore de l’énormitĂ© du travail qui va se prĂ©senter, d’autant plus dĂ©licat Ă  mener qu’il fallait alors rĂ©parer en provisoire, sans passer de suite au dĂ©finitif. L’ACCOMPAGNEMENT DE LA PROGRESSION DES ARMÉES ALLIÉES JUIN-AOÛT 1944 ET LA RECONSTRUCTION PROVISOIRE DES INSTALLATIONS FERROVIAIRES Ouest et rĂ©gion parisienne AprĂšs le 6 juin, les bombardements aĂ©riens prennent de l’ampleur, mais prĂ©sentent plus de discernement dans le choix de leurs objectifs. La crainte de l’arrivĂ©e des renforts allemands vers la Normandie impose le maintien du blocus des voies ferrĂ©es d’accĂšs par la coupure des ouvrages d’art importants des bassins de la Seine et de la Loire, si bien que les opĂ©rations tactiques, Ă  effet immĂ©diat, prennent enfin le pas sur les destructions “ en surface ” des triages, dĂ©pĂŽts et ateliers. Mais le manque de prĂ©cision des bombardiers, enclins par ailleurs aux dĂ©lestages prĂ©maturĂ©s pour mieux manƓuvrer afin d’éviter la chasse adverse, continue de causer des destructions civiles dĂ©sastreuses. Alors que le rythme des bombardements Ă  objectifs ferroviaires s’élĂšve en juin 6 Ă  27 missions par jour et en juillet 3 Ă  20, les opĂ©rations ponctuelles prĂ©dominent. Elles culminent en aoĂ»t 36 le 7 aoĂ»t, et 44 le 13 avec une majoritĂ© d’attaques et mitraillages de trains ou de petites gares, y compris les installations en voie mĂ©trique du Blanc-Argent, des CĂŽtes-du-Nord ou du Petit Anjou ! Il est vrai qu’à haute vitesse, en altitude, l’échelle est difficile Ă  apprĂ©cier16. S’y ajoutent les bombardements “ lourds ” multipliĂ©s jusqu’au succĂšs visant Ă  dĂ©truire les ponts et viaducs. Les rĂ©sultats sont spectaculaires et moins meurtriers. Citons OrlĂ©ans et le pont sur la Loire, Cinq-Mars-la-Pile, Saint-CĂŽme prĂšs de Tours, les ponts de la VendĂ©e et de Pirmil Ă  Nantes, atteints en juin et juillet 1944. De mĂȘme, tous les ouvrages de la Seine, depuis ceux de la Grande Ceinture Athis, 5 fois bombardĂ© du 27 mai au 8 juin ; Maisons-Laffitte, 6 fois du 26 mars au 24 juin ; cependant les plus grandes brĂšches n’affectaient souvent qu’une demi-largeur, si bien que les militaires ont pu utiliser la Grande Ceinture de façon permanente comme grande ligne de rocade17. Ce fait, ignorĂ© des AlliĂ©s jusqu’à ce qu’ils en profitent Ă  leur tour, rendait en partie inutile la destruction des ponts sur la Seine. D’ailleurs, sauf les exceptions mentionnĂ©es ici, la quasi-totalitĂ© des grands ouvrages d’art de la SNCF qui ont Ă©tĂ© dĂ©truits complĂštement et durablement l’ont Ă©tĂ© par le gĂ©nie militaire allemand en retraite, non par l’aviation. Provence et zone du RhĂŽne au Rhin juin-juillet 1944 Bien que nous ayons dĂ©jĂ  signalĂ© les essais de coupure du trafic vers l’Italie Ă  Modane RAF et sur la ligne de cĂŽte RAF et USAF d’AnthĂ©or Ă  Vintimille, les AlliĂ©s n’avaient guĂšre affaibli le trafic militaire ou d’intendance vers le front italien, qui atteignait plus de 20 000 t/jour, dont 14 000 par la cĂŽte. Les objectifs ferroviaires en Provence ne sont donc dĂ©voilĂ©s que fin mai. Les AlliĂ©s privilĂ©gient les opĂ©rations de jour, par l’USAF Ă  partir du 25 mai sur Carnoules et Badan 34 et 38 morts, VĂ©nissieux et AmbĂ©rieu. Suivent, quelques jours aprĂšs, Arles, puis Toulon, Montpellier, BĂ©ziers, surtout Avignon 27 mai avec 525 morts, soit autant que Coventry en 1940, la “ rĂ©fĂ©rence ” anglaise. C’est, aprĂšs une courte accalmie, le 12 juillet, encore Miramas, Arles et Balaruc, Cannes-la-Bocca, La Seyne ; le 2 aoĂ»t, encore Avignon ; le 6 aoĂ»t se renouvelle le malheureux raid de Lyon-Vaise et Croix-Rousse, Chasse, Badan, Valence, Tarascon, encore Miramas, ne laissant plus de doutes sur le dĂ©barquement de Provence et la remontĂ©e prĂ©vue ensuite des troupes par la vallĂ©e du RhĂŽne, vers le Rhin. L’USAF va alors Ă©viter, en principe, de prendre pour objectif la rĂ©gion lyonnaise et les lieux tragiques que sont dĂ©sormais Saint-Étienne qui a comptĂ© le 26 mai un maximum de 1 084 morts civils et 15 000 sinistrĂ©s sans destructions d’installations ferroviaires, Lyon-Mouche 63 morts, mais surtout Lyon-Vaise, toujours le 26 mai, avec 717 morts, 1 129 blessĂ©s et 20 000 sinistrĂ©s, pour un rĂ©sultat bien maigre, puisque sont atteints un dĂ©pĂŽt et des voies de garage de seconde importance, situĂ©s dans une zone trĂšs urbanisĂ©e. “ Sacrifices Ă©normes pour rĂ©sultats insignifiants ”, indique le cĂąble du chef rĂ©gional FFI adressĂ© Ă  Alger. A-t-il atteint les responsables de la 15e USAF ? Nous l’ignorons, puisque, par exemple, Lyon-Vaise est encore “ revisitĂ© ” le 6 aoĂ»t avec autant d’inconscience. Ce sinistre 26 mai, l’USAF manque les faisceaux de la Buisserate Ă  Grenoble 37 morts. Pire encore, Ă  ChambĂ©ry, 72 Liberators totalisent 120 morts pour 400 impacts, dont 80 seulement touchent les emprises SNCF, le reste causant 3 000 sinistrĂ©s. À Nice Saint-Roch, toujours ce fatidique 26 mai, on compte, pour 180 impacts, 384 morts et 5 600 sinistrĂ©s, pour la destruction de “ seulement ” 159 wagons et 5 locomotives, mais aussi de 30 tramways, sans parler d’un train civil atteint sur le pont du Var, avec 52 morts et 58 blessĂ©s. À croire que les aviateurs de la 15e USAF venant d’Afrique du Nord Ă©taient vraiment des dĂ©butants inconscients, ou incapables, d’autant que la chasse adverse et la dĂ©fense anti-aĂ©rienne n’étaient pas au rendez-vous de ces opĂ©rations, contrairement au Nord-Ouest de la France. Il ne leur reste aucune excuse pour ces lĂąchers incohĂ©rents, criminels et sans commentaires ­ultĂ©rieurs
 Mais les sentiments antibritanniques de la population augmentent dĂšs le lendemain, 27 mai, Ă  Marseille, Ă  tort, puisque c’est encore l’USAF-15 qui, avec moins de 120 appareils, Ă  4 000 m d’altitude, saupoudre certes les gares Saint-Charles et Blancarde de 100 bombes, mais aussi la ville et ses banlieues de plus de 700 autres bombes, lui confĂ©rant le triste privilĂšge du record absolu de victimes en un seul raid avec 1 752 morts recensĂ©s, 18 000 sinistrĂ©s, et des dĂ©gĂąts, lĂ  encore, insignifiants portĂ©s aux installations ferroviaires, visĂ©es ou non, port, gares et dĂ©pĂŽts compris. L’état des lieux jusqu’à fin aoĂ»t 1944 et la nĂ©cessaire reprise des transports par rail Les attaques aĂ©riennes s’arrĂȘtent Ă  la fin du mois d’aoĂ»t 1944, le 18 pour les bombardements majeurs. Le bilan des destructions a Ă©tĂ© dressĂ© par la SNCF plus tard. Il arrĂȘte les comptes “ Ă  la LibĂ©ration ”, date qui n’était pas la mĂȘme pour les zones successivement libĂ©rĂ©es, allant de dĂ©but juillet en Cotentin et Normandie au 9 mai 1945 sic pour la “ poche ” de Dunkerque. DĂšs le 31 mai 1944, R. Le Besnerais constatait que 29 triages sur 53 sans l’Alsace-Lorraine Ă©taient inutilisables, 70 dĂ©pĂŽts sur 167, 3 grands ateliers sur 9. Ce qui explique, en partie, une baisse de trafic de moitiĂ© par rapport aux mois de janvier Ă  mars. Certes, les difficultĂ©s de circulation, auxquelles commencent Ă  s’ajouter les coupures d’ouvrages d’art, rĂ©duisent trĂšs fortement les circulations voyageurs 20 % des valeurs 1938. Le trafic ­mar­chandises, transports allemands compris, est encore de prĂšs de 100 000 wa­gons chargĂ©s par semaine, contre 188 000 en janvier et 232 000 en 1943. Pour sa part, le trafic militaire allemand, prioritaire, dĂ©passe encore la moitiĂ© des prĂ©visions sur la rĂ©gion Ouest, il reprĂ©sente 78 % du trafic sur le Sud-Est et 82 % sur le Sud-Ouest. Mais le chiffre du Nord, 21 % seulement, semble indiquer les effets de l’opĂ©ration de dissuasion Fortitude. En effet, ces actions se conjuguent par hasard avec les opĂ©rations Crossbow dĂ©cidĂ©es en consĂ©quence des craintes britanniques de reprĂ©sailles. Grandissantes, Ă  juste titre, jusqu’à la mi-juin, elles entraĂźnent des actions continuelles sur les voies ferrĂ©es d’alimentation des trĂšs nombreuses bases de lancement des V1 350 prĂ©vues, 100 rĂ©alisĂ©es. Plusieurs milliers de ces bombes volantes, Ă  partir du 13 juin et durant tout l’étĂ©, survolent en effet le “ dĂ©troit ” de la Manche vers Londres. Les actions prĂ©ventives ou rĂ©pressives contre ces armes nouvelles, jusqu’alors sporadiques tant qu’elles Ă©taient en construction, vont occuper dĂ©sormais les unitĂ©s “ tactiques ” autant que le Bomber Command. Les opĂ©rations dites tactiques sont effectuĂ©es par de petits groupes de 3 ou 6 bombardiers moyens bimoteurs. Depuis les tentatives de 1943, ils sont moins utilisĂ©s pour des objectifs ferroviaires, sauf en reconnaissance ou encore, Ă  partir de mai 1944, pour le harcĂšlement, avec mitraillage, de tout convoi surpris en route, y compris ceux des chemins de fer Ă©conomiques aprĂšs la Normandie, la Somme et le Pas-de-Calais. Sous le nom code de RAMROD, la RAF, avec des Spitfire adaptĂ©s, Ă©quipĂ©s de roquettes aussi bien que de bombes, avait entrepris des opĂ©rations en piquĂ© Ă  moyenne altitude 3 000 Ă  1 200 m environ plus prĂ©cises que les prĂ©cĂ©dentes sur des objectifs ferroviaires18. Bien que ces raids soient ineffi­caces dĂšs que la couche nuageuse est importante, la moyenne statistique dĂ©montre qu’ils sont plus prĂ©cis et mettent moins en danger Ă  la fois les Ă©quipages et les civils ou cheminots travaillant au voisinage des coups au but. Avant mĂȘme le dĂ©barquement du 6 juin, non moins de 1 284 bombardements aĂ©riens ont frappĂ© 793 localitĂ©s en France, dont 363 attaques aĂ©riennes d’installations ferroviaires, ce qui est encore peu en comparaison des 800 raids encore Ă  venir jusqu’à fin aoĂ»t. Les pertes humaines du cĂŽtĂ© des cheminots, malgrĂ© la reprise des mitraillages de convois, sont, bien qu’éle­vĂ©es, proportionnellement trĂšs faibles par rapport Ă  celles des “ civils ”. Pour les cinq premiers mois de 1944 et plus de 232 raids, 470 cheminots sont morts et 1 100 autres blessĂ©s par faits de guerre en service. De 1941 Ă  1943 on avait comptĂ© 464 cheminots et 2 000 civils tuĂ©s pour moins de 80 raids. Mais Ă  partir de mars 1944 les bombardements “ de surface ” vont faire dix fois plus de morts civils encore autour d’objectifs ferroviaires. Des destructions mieux ciblĂ©es – mais beaucoup moins nombreuses – causent des pertes rĂ©duites, ce qui dĂ©montre bien les rĂ©sultats hasardeux des bombardements “ de surface ”. De plus, la hĂąte des occupants Ă  reconstruire au plus vite un passage, mĂȘme Ă  voie unique, dans les zones sinistrĂ©es, soit environ 200 km de voies Ă  reconstruire, requiert un nombre de plus en plus important de personnel pour travailler sur des chantiers Ă  trĂšs haut risque des bombes Ă  retardement ayant parfois explosĂ© cinquante jours aprĂšs le raid. Ce qui conduit la direction gĂ©nĂ©rale de la SNCF a Ă©crire fin juin 1944 au ministre de tutelle secrĂ©taire d’État Ă  la Production industrielle et aux Communications, Ă  l’intention des autoritĂ©s allemandes HVD, que 
 tout rĂ©cemment, plusieurs RĂ©gions ont reçu presque simultanĂ©ment de la part des AutoritĂ©s d’Occupation des ordres formels leur enjoignant d’augmenter d’urgence leurs effectifs, de maniĂšre Ă  remettre complĂštement en Ă©tat un certain nombre de grands triages pour lesquels le programme Ă©tabli en commun ne prĂ©voyait que le rĂ©tablissement minimum des voies indispensables. Sur certains points, des requis civils ont Ă©tĂ© envoyĂ©s d’office par ces AutoritĂ©s d’Occupation en vue des travaux en question. S’ensuivent des considĂ©rations sur l’incapacitĂ© de la SNCF, devant une telle demande, Ă  dĂ©passer le niveau prĂ©sent des effectifs sur les chantiers de rĂ©tablissement des circulations, “ effectif d’ouvriers de toutes conditions dĂ©passant 40 000 hommes ”19. La lettre demande en conclusion que l’on renonce aux mesures envisagĂ©es20. Nous ignorons la suite donnĂ©e Ă  cette requĂȘte, dont la satisfaction eĂ»t Ă©tĂ© de toute façon sans effet en juillet-aoĂ»t 1944. Les AlliĂ©s prĂ©voyaient d’utiliser pour leur part ces moyens dispersĂ©s, nĂ©cessaires Ă  leur progression de Cherbourg Ă  Carentan, Le Mans et Paris. Comme la reconnaissance aĂ©rienne leur permettait d’ĂȘtre informĂ©s du progrĂšs des travaux, aucune directive de sabotage ferroviaire ne fut donnĂ©e Ă  la rĂ©sistance active, sauf dans les zones de retraite des armĂ©es allemandes aprĂšs le mois d’aoĂ»t. Ce qui n’empĂȘcha pas la destruction des ouvrages par les Allemands en retraite, beaucoup plus mĂ©thodique et radicale que celle effectuĂ©e par les Français en 1940. C’est sans doute pourquoi, selon les relevĂ©s quotidiens de juillet et aoĂ»t 1944 que nous possĂ©dons pour le Sud-Ouest, les actions aĂ©riennes, bien que plus nombreuses encore qu’en juin jusqu’à 45 opĂ©rations par jour, jusqu’à 10 au seul rĂ©seau Sud-Ouest ne sont-elles plus que des attaques locales, spĂ©cifiques, de trains en circulation le plus souvent, effectuĂ©es par un groupe d’avions ou des appareils isolĂ©s. Les grosses attaques “ de surface ” concernent les gares d’approvisionnement en armes V1 et V2 du Nord-Ouest de la France. Au 31 aoĂ»t 1944, les chantiers avaient dĂ©jĂ  reçu plus de 16 600 t de ­bombes, en 94 raids depuis 1943, dont 15 opĂ©rations avec les “ Tallboys ” de 5,4 t21. Le bilan global, fin 1944 Le bilan global ne s’est alourdi cependant que modĂ©rĂ©ment, et la paralysie complĂšte du rĂ©seau ferrĂ© voulue par les cheminots, fin aoĂ»t, dans les rĂ©gions encore en pleine guerre permet aussi d’éviter de nouveaux bombardements lourds. Deux exceptions sont constituĂ©es par la RĂ©gion Est, oĂč se reportent les opĂ©rations liĂ©es au repli allemand, et les “ poches ” qui provoquent de nouvelles victimes civiles inutiles, dont des cheminots. Ces pertes sont les plus lourdes quand on les compare Ă  la valeur stratĂ©gique rĂ©elle des lieux visĂ©s, qui avait Ă©tĂ© exagĂ©rĂ©e par les Ă©tats-majors, coupables d’une erreur d’apprĂ©ciation. Nous voulons citer ici, par devoir de mĂ©moire, outre les quelques 12 000 morts dĂ©jĂ  atteints sur des objectifs strictement ferroviaires, les civils du Havre, de Royan, mais aussi de Boulogne et Calais, cette derniĂšre ayant le triste privilĂšge d’un bombardement “ ami ”, par erreur, en fĂ©vrier 1945 97 morts au lieu de Dunkerque qui Ă©tait visĂ©. Ici, il n’y eut aucune “ repentance ”, ni indemnitĂ©s posthumes. Et c’est pourquoi, fin 1945, une Ă©tude amĂ©ricaine citĂ©e entre autres par E. Florentin basĂ©e sur les premiers bilans de destructions, ceux mis Ă  leur disposition par la SNCF, conclut tardivement que “ les attaques prĂ©cĂ©dant le D. Day contre les triages français n’étaient pas nĂ©cessaires, les 70 000 t d’explosifs qui y ont Ă©tĂ© dĂ©versĂ©es auraient pu ĂȘtre affectĂ©es Ă  d’autres cibles ”22. Nous n’en voulons pour preuve que les statistiques gĂ©nĂ©rales qui colla­tionnent les donnĂ©es transmises par les RĂ©gions SNCF et les arrondissements, indiquant par exemple l’évolution du parc disponible d’engins moteurs ou celui du matĂ©riel roulant marchandises. MalgrĂ© une Ă©norme rĂ©duction, de 217 000 wagons encore thĂ©oriquement au parc dĂ©but mai 1944 Ă  moins de 174 000 en septembre, l’effectif disponible pour des transports militaires Ă©tait acceptable et n’a pas entravĂ© au degrĂ© souhaitĂ© le repli des armĂ©es allemandes vers l’Est. Les photos aĂ©riennes alliĂ©es de reconnaissance qui ont identifiĂ© de tels trains en tĂ©moignent. Les AmĂ©ricains, en aoĂ»t dans le Cotentin, ont utilisĂ© en prioritĂ© du matĂ©riel SNCF disponible, heureux de retrouver des locomotives Baldwin ou Alco de
 1918. MĂȘme si l’on prend en compte les indisponibilitĂ©s ou avaries dues aux bombardements aĂ©riens et aux ­transferts en Allemagne, les 74 000 ou 76 000 wagons “ manquant ” au parc hors Alsace-Lorraine ne reprĂ©sentent “ que ” 30 % du parc total, alors que les transports militaires nĂ©cessitent 20 Ă  25 % des wagons du parc utilisable. Ce qui montre bien, une fois de plus, l’ineptie de la “ stratĂ©gie ” de destruction des triages et des matĂ©riels garĂ©s sur leurs voies et, le plus souvent, vides. Les transports militaires alliĂ©s de l’hiver 1944 n’ont que peu manquĂ© de wagons et de locomotives, d’autant que le trafic entre les ports et les fronts ne dĂ©passait guĂšre le million de tonnes mensuelles les 500 locomotives dĂ©barquĂ©es dĂšs fin aoĂ»t Ă  Cherbourg, puis les quelques milliers de wagons en “ kit ”, ou montĂ©s qui les suivent permettent alors de passer de 12 000 t transportĂ©es quotidiennement pour les AmĂ©ricains en octobre Ă  15 000 t en dĂ©cembre et de multiplier par 8 les trains-kilomĂštres. Ce qui ne reprĂ©sente guĂšre plus de 30 trains de 1 000 t brutes, soit 2 trains par heure au plus. Mais la limite de capacitĂ© est celle des lignes Ă  voie unique, d’oĂč l’intĂ©rĂȘt pour les AlliĂ©s de remettre en service des doubles voies Ă©lectrifiĂ©es
 ce qui est fait dĂšs mi-novembre pour Paris-Le Mans23 alors que le 1er train venant de Cherbourg arrivait aux Batignolles le 30 aoĂ»t 1944 !. Pour les lignes de la vallĂ©e du RhĂŽne il en est de mĂȘme. La liaison Aix-en-Provence – Grenoble est ouverte immĂ©diatement derriĂšre la progression des troupes dĂšs le 15 septembre Ă  Sisteron, et le 25 septembre est ouverte la ligne de la rive gauche du RhĂŽne jusqu’à Lyon, de mĂȘme que Valence-Grenoble. Le rail suit donc bien les troupes, en l’absence de toute rĂ©action ennemie. POUR FINIR QUELLE LEÇON À TIRER DES BOMBARDEMENTS DE VOIES FERRÉES ? On sait que malgrĂ© les ruines, qui dĂ©passent l’imagination, des villes rasĂ©es par l’aviation alliĂ©e outre-Rhin depuis 1942, la production allemande industrielle de guerre a atteint des sommets
 en 1943-1944. Alors que la France comptait pĂ©niblement 6 000 Ă  7 000 locomotives en Ă©tat de marche fin 1944, l’Allemagne en disposait de 36 000, dont prĂšs de 11 000 Kriegsloks neuves, type 150 Ă  vapeur, puissantes et robustes, aptes au trafic lourd ou militaire, et ce n’est qu’un exemple. Faut-il conclure que les bombardements aĂ©riens ont toujours Ă©tĂ© un Ă©chec ? Certainement pas si nous considĂ©rons globalement leur rĂŽle dans la prĂ©paration et le succĂšs du dĂ©barquement et, surtout, l’appui tactique qu’il ont donnĂ© au sol Ă  la progression des troupes. Il est inutile, en revanche, de revenir sur les insuffisances de l’aviation qui devait poursuivre Ă  titre “ tactique ” le harcĂšlement nĂ©cessaire Ă  la fixation des troupes allemandes au jour “ J ” du dĂ©barquement en Normandie. Il est vrai que l’offensive fut l’enjeu de luttes intestines, d’oĂč l’incohĂ©rence apparente des opĂ©rations menĂ©es sur les cibles ferroviaires et les lourdes erreurs qu’elle a parfois entraĂźnĂ©es. Ce n’est certainement pas en annihilant les gares, les citĂ©s cheminotes et le matĂ©riel roulant de la SNCF Ă  ce moment-lĂ  que le cours de la guerre a changĂ© ; et le rĂ©sultat obtenu ne peut faire oublier la mort de 78 000 innocents en France, dont 15 000 sur des sites ferroviaires voir tableau 1. AprĂšs la bataille du rail, les cimetiĂšres alliĂ©s Selon les sources officielles, la RAF a perdu 8 655 avions en cours d’opĂ©ration, plus 1 600 en cours d’entraĂźnement ou portĂ©s disparus. L’USAF en a perdu 9 466 en tout. En hommes d’équipage, cela signifie 74 000 pour la RAF, dont 55 750 morts au combat ou par accident. Pour l’USAF, les 8e et 15 e Air Force qui nous intĂ©ressent ici ont perdu environ 30 000 hommes, au total 47 000 avec 4 750 avions perdus sur 12 731 utilisĂ©s, soit 37 % des B17, taux qui semble supĂ©rieur Ă  celui de la RAF. Le choix des AlliĂ©s, si tant est que ce fut un choix, pour les bombardiers lourds, leur a coĂ»tĂ© au total plus de 100 000 hommes jeunes et entraĂźnĂ©s24. Était-ce un sacrifice inĂ©vitable ? Le sujet reste encore contestable puisque des questions fondamentales ne trouveront de rĂ©ponse qu’avec l’accĂšs Ă  certaines archives britanniques papiers Churchill et Lindeman lord Cherwell, soit seulement Ă  partir de 2019. À une Ă©poque oĂč les acteurs ou tĂ©moins revendiquant chacun “ leur ” version de l’histoire auront disparu, le sujet pourra peut-ĂȘtre, enfin, ĂȘtre abordĂ© sans a priori ni appel aux Ă©motions vĂ©cues25. “ L’efficacitĂ© de l’impact direct l’emporte sur le tapis de bombes ” c’est l’avis des analystes, anciens ou actuels, de la stratĂ©gie comparĂ©e Ă  la tactique, en ce domaine sensible et difficile oĂč la technique a Ă©voluĂ© plus vite que la rĂ©flexion26. Il est regrettable que ces leçons durement acquises n’aient pas empĂȘchĂ©, depuis lors, d’illusoires attaques du rail en Europe. L’histoire reconnue, analysĂ©e et comprise sans passion reste encore Ă  apprendre par les pouvoirs, qui ignorent trop ses leçons. _______________ 1. Les forces aĂ©riennes françaises disposaient en 1940, avant les constructions dĂ©cidĂ©es par R. Dautry, de moins de 500 chasseurs modernes, et d’aucun bombardier rĂ©cent. La production prĂ©vue Ă©tait de 400 appareils nouveaux par an. Les Britanniques en Ă©taient au mĂȘme point avec une production prĂ©vue annuelle de 220 bombardiers. Mais ils n’en disposaient d’aucun en France, et de 130 chasseurs seulement. Au total, alors que les Allemands disposaient de plus de 1 500 bombardiers et de 1 000 chasseurs lors de la campagne de France, les AlliĂ©s ne totalisaient que 700 appareils, toutes catĂ©gories confondues. Quant aux chasseurs bombardiers capables d’attaques en piquĂ©, 342 Allemands s’opposaient Ă  54 Français et aucun Anglais voir bibliogr. [15]. 2. Boulogne-sur-Mer a vu 52 attaques aĂ©riennes se succĂ©der sur le port et les installations ferroviaires, du 12 juin 1940 Ă  fin 1941. Mais le premier raid contre une gare SNCF se place le 4 avril 1942 Ă  Saint-Omer, oĂč 12 Boston et 4 Wellington obtiennent un effet heureusement nul sur la gare, bĂątiment patrimonial, mais avec dĂ©jĂ  des morts civils. De nouvelles attaques suivent donc. La RAF s’essaie aussi, toujours en vain, sur Cherbourg 15 avril 1942, Hazebrouck 13 avril et 29 juin 1942 et mĂȘme Lille 20 juillet 1942, opĂ©rations suivies d’un rĂ©pit de prĂšs de six mois. 3. Voir Florentin [1] et Regan [17], confirmant les dĂ©clarations peu nuancĂ©es de Hastings [11]. Voir aussi Jones [14]. 4. Comme il en existe encore des vestiges de nos jours, Ă  Narbonne ou Dijon par exemple, avec la fonction de magasin pour matiĂšres dangereuses ! Signalons la tentative d’installations protĂ©gĂ©es beaucoup plus complĂštes, et complexes, dont l’abri de poste de commandement et rĂ©gulation du trafic Est parisien dĂ©nommĂ© de nos jours le “ Bunker ” rĂ©alisĂ© en juillet 1939 sous les quais 2 et 3 de la gare de l’Est Ă  Paris. Cet abri de dĂ©fense unique sur le rĂ©seau français, qui fut opĂ©rationnel, offrait 120 mÂČ protĂ©gĂ©s, et pouvait abriter 72 personnes. 5. La plupart des objectifs du rail français, sauf au Nord, Ă©taient assez Ă©loignĂ©s des terrains de la chasse de nuit allemande et surtout restaient en avant de la cĂ©lĂšbre “ ligne Kammhuber ”, barrage d’interception combinant radars, projecteurs et contrĂŽle des chasseurs de nuit, trĂšs redoutĂ© des bombardiers alliĂ©s, dont seuls les secteurs marginaux sud, dits zones 7, 8 et 9, intĂ©ressaient la France, de Givet Ă  Troyes par Rethel. De jour, bien des cibles Ă©taient proches de terrains actifs comme Laon 2 terrains de chasse, Cambrai 3, Longueau 2, Caen 2, sans parler des 64 terrains du Nord et de la Picardie ou de l’Oise. Ce fut, en partie, Ă  l’origine des dĂ©sastres de Rennes, Rouen, Lille-Lomme. Citons, plus tard, en 4 opĂ©rations avec 617 appareils, les pertes de 19 avions et plus de 150 hommes d’équipage dans la nuit du 10 au 11 avril 1944, sur Tours-Saint-Pierre, Tergnier, Laon et Aulnoye. Ces 3 % de pertes s’accompagnent Ă©videmment d’un nombre anormalement Ă©levĂ© de bombes dispersĂ©es en dehors des objectifs. 6. Il semble, aujourd’hui encore, difficile Ă  concevoir que les ordres de formation des vagues de bombardiers sur raids ferroviaires comportaient 7 Ă  12 appareils de front, soit une couverture d’au moins 500 Ă  800 m, pour atteindre, en long, des gares de largeur allant de 100 m Ă  300 m au plus
 MĂȘme en cas de faible vent latĂ©ral, la surface “ arrosĂ©e ” est toujours au moins le double de celle des objectifs correctement ciblĂ©s. De plus, dans le cas de vagues successives, si les premiers lĂąchers sont bien marquĂ©s, la fumĂ©e obscurcit complĂštement l’objectif, et dĂšs la 3e il y en avait jusqu’à 10 ! les lĂąchers Ă©taient faits au jugĂ© et au plus vite. On constate d’ailleurs des rĂ©sultats encore plus mauvais si l’attaque est perpendiculaire Ă  l’objectif exemples du viaduc d’AnthĂ©or et de certains ponts sur la Seine et la Loire. 7. Voir [23]. 8. Voir [11]. 9. Un des griefs les plus rĂ©pĂ©tĂ©s des informateurs alliĂ©s Ă©tait l’absence de prise en considĂ©ration des rapports du sol par les Ă©tats-majors des forces aĂ©riennes. On constate mĂȘme avec surprise, connaissant l’existence de telles observations, et la certitude de leur transmission, l’absence de leur mention par les War Diaries ­de la RAF agendas de combat et bombardements, publiĂ©s en 1985 seulement, voir bibliogr. [13]. Plus curieusement encore, dans le cas d’opĂ©rations ayant mal tournĂ©, il semble qu’au lieu des rapports prĂ©cis et souvent protestataires, Ă©manant d’agents britanniques travaillant en France avec la RĂ©sistance, on trouve seulement la mention “ Pas de rapport local Ă©manant du sol. ” C’est le cas des raids les plus meurtriers de civils, comme Rennes, Nantes, Rouen, Lille, Saint-Étienne, Besançon, Lyon-Vaise. Une exception AmbĂ©rieu, oĂč, aprĂšs une premiĂšre attaque inutile, la RĂ©sistance obtient de Londres l’arrĂȘt des raids aĂ©riens, aprĂšs avoir fait la preuve de l’efficacitĂ© locale des sabotages, qui avaient coĂ»tĂ© de nombreux otages et dĂ©portĂ©s. 10. Une exception due au hasard est le cas de la gare de triage de Vaires oĂč un convoi de munitions stationnĂ© parallĂšlement Ă  des trains de troupes a provoquĂ© la mort de 1 200 Ă  1 300 militaires lors de la premiĂšre attaque des 29-30 mars 1944. Des hĂ©catombes analogues, avec destructions importantes de matĂ©riel de guerre, ont eu lieu plus tard, au voisinage des ponts sur la Seine, lors du repli des troupes allemandes de Normandie ou lors d’attaques des trains de V1 oĂč 33 wagons Ă©quivalaient Ă  prĂšs de 100 bombes de 1 t. Mais c’était alors le fait des chasseurs-bombardiers tactiques attaquant en piquĂ© Ă  moyenne altitude, et non des ­quadrimoteurs lourds et malhabiles du Bomber Command ou de l’USAF. 11. La masse de matĂ©riel neuf ou de remplacement demandĂ© reste dans des limites encore trĂšs raisonnables jusqu’en mai. Une preuve en est la demande de la SNCF Ă  la “ Hauptverkehrsdirektion Paris – 29, rue de Berri ” d’un contingent d’acier pour rĂ©parer certaines installations en fĂ©vrier 1944, alors estimĂ©es prĂ©cisĂ©ment Ă  277 t seulement outre 38 t dĂ©jĂ  obtenues, pour couvrir les rĂ©parations de Mohon, Chaingy, Chevilly, Persan Beaumont, Sotteville ateliers, Tergnier 145 t Ă  lui seul et mĂȘme les ponts sur le Doubs, Ă  Lyon et au Teil faits de rĂ©sistance pour 40 t
 Par prĂ©vision, un supplĂ©ment de 500 t seulement est demandĂ©, alors que plusieurs milliers de tonnes vont ĂȘtre bientĂŽt nĂ©cessaires. 12. Telle la 4e division blindĂ©e dont les trains pour venir de Gand en Normandie font quatre dĂ©tours et mettent dix jours au lieu de trois Ă  quatre pour couvrir le trajet. Un officier d’état-major allemand, chargĂ© jusqu’à la fin d’octobre 1944 des transports sur le front de l’Ouest, a dĂ©clarĂ©, aprĂšs avoir Ă©tĂ© fait prisonnier “ Des mouvements qui devaient ĂȘtre effectuĂ©s Ă  la cadence quotidienne de 10 Ă  12 trains ne se faisaient plus qu’au taux de deux Ă  trois par jour. ” 13. Ou “ trains de travaux ”, trains de secours dĂ©pendant du Service Voie et BĂątiments, composĂ©s de voitures amĂ©nagĂ©es pour hĂ©berger le personnel d’un chantier, de wagons ateliers pourvus de l’outillage nĂ©cessaire et de wagons magasins chargĂ©s de matĂ©riaux. PrĂ©vus en service normal pour effectuer des travaux ou des rĂ©parations en cas de catastrophe naturelle ou d’accident, la SNCF en maintenait 1 Ă  2 par grande rĂ©gion. Ce nombre a Ă©tĂ© multipliĂ© par 3 Ă  partir de 1943. 14. On retrouve alors facilement sur les Ă©tats ou relevĂ©s SNCF un nombre Ă©levĂ© d’engins garĂ©s, ou en rĂ©paration, dans les remises ou ateliers de dĂ©pĂŽt, ceux actifs Ă©tant dispersĂ©s, surtout de nuit, en de multiples lieux plus discrets. 15. L’ensemble des lignes Ă  haute tension SNCF de 60 kV Ă  220 kV avariĂ©es par faits de guerre reprĂ©sentent 1 236 pylĂŽnes et 225 km de ligne Ă  rĂ©parer, soit moins de 5 % du rĂ©seau Ă©lectrifiĂ©, alors de 4 872 km. 16. Nous n’en citerons, comme preuve antĂ©rieure, que l’attaque en 1940 par la Luftwaffe du cĂ©lĂšbre train miniature britannique cĂŽtier Romney Hythe and Dimchurch Railway dans le Kent. À l’échelle 1/4 de voie de 38 cm, il va devoir s’équiper d’un train blindĂ© anti-aĂ©rien pour rĂ©pondre aux attaques de pilotes un peu myopes
 Mais, en France, presque toutes les voies Ă©troites, en zone de bataille ou non, seront souvent confondues avec des voies ­normales. 17. Se reporter Ă  l’article “ Ouvrages d’art de la Grande Ceinture ” par M. Leduc, Revue gĂ©nĂ©rale des chemins de fer du 11 dĂ©cembre 1945, Ă©galement mentionnĂ©s dans le film La renaissance du rail 1947 d’A. PĂ©riĂ© et M. Leduc produit par la SNCF. On constatera le peu d’attaques des ouvrages d’art jusqu’en juin 1944. MĂȘme aprĂšs que des ponts sur la Seine infĂ©rieure et la Loire ont Ă©tĂ© visĂ©s, ceux qui sont touchĂ©s par des attaques aĂ©riennes le sont Ă  cause d’autres objectifs par exemple, le viaduc de Maintenon, Ă  cause du dĂ©pĂŽt de munitions voisin. Citons enfin le cas exemplaire de Bielefeld en Allemagne, ou le viaduc systĂ©matiquement bombardĂ© Ă  de trĂšs nombreuses reprises, y compris avec “ Tallboys ” de 5,4 t, Ă©tait, depuis les premiĂšres attaques, court-circuitĂ© par une dĂ©viation en vallĂ©e, extrĂȘmement bien camouflĂ©e, qui a pu Ă©chapper Ă  l’observation aĂ©rienne, et assurait la continuitĂ© d’une des principales artĂšres de la Ruhr dĂ©but 1945. Une situation analogue a existĂ© en France lors de la destruction du tunnel de Saumur, Ă©galement par les premiers “ Tallboys ”, grĂące Ă  la dĂ©viation de Thouars Ă  Tours via la ligne dite de la VendĂ©e, et les ponts du Cher et de la Loire encore praticables. 18. On peut citer comme exemple le raid 921 du 25 mai 1944 sur Longueau et Amiens qui a impliquĂ© 36 Spitfire, dont 26 chasseurs-bombardiers pourvus chacun d’une seule bombe de 500 livres. Sept autres centres ferroviaires Ă©taient visĂ©s ce jour-lĂ  dans le Nord, l’Oise, la Seine-InfĂ©rieure. En employant la mĂȘme tactique que pour les sites de V1, l’opĂ©ration fut au moins aussi efficace en coups au but 12 sur 26 que des vagues massives de 150 ou 200 bombardiers lourds. Cependant, les autres opĂ©rations ne sont pas toujours payantes ce mĂȘme jour, les attaques de Spitfire ou Typhoon sur ArmentiĂšres et Hazebrouck, Buchy, Gisors, Formerie, Motteville et Cassy dont 4 gares en substitution aux objectifs couverts de nuages de Valenciennes et du Grand Verdret, soit, au total, 133 appareils, se solderont par 157 bombes lĂąchĂ©es, entre 1 200 et 1 800 m, et moins de la moitiĂ© au but. Ce qui n’est toujours pas si mal, puisque, malgrĂ© la DCA parfois trĂšs active Gisors, 2 appareils seulement sont touchĂ©s. 19. Un effectif qui varie en fait de 36 000 Ă  65 000, Ă  comparer avec le maximum de 11 000 ouvriers spĂ©cialisĂ©s, SNCF et d’entreprises, ayant reconstruit les ponts et tunnels de 1940 Ă  1942. 20. “ D’autre part, il est Ă  craindre que le rĂ©tablissement de tels triages dans leur intĂ©gritĂ© ne provoque de nouvelles destructions rendant vains et par suite inopportuns les efforts que nous aurons fournis et provoquant de nouvelles pertes de matĂ©riel. Les AutoritĂ©s d’Occupation paraissaient avoir compris, comme nous-mĂȘmes, l’inopportunitĂ© de tels efforts et nous avaient autorisĂ©s Ă  entreprendre certains travaux en vue d’assurer une dispersion de nos moyens de triage dans des Ă©tablissements moins importants ; une partie de ces travaux est dĂ©jĂ  rĂ©alisĂ©e. ” 21. [8]. 22. [23, 27]. 23. AprĂšs leur blocage de quelques semaines dans la pĂ©ninsule de Cherbourg, puis la reddition des Allemands, les AmĂ©ricains y ont trouvĂ© en Ă©tat de marche Ă  leur arrivĂ©e 50 locomotives, 1 384 wagons, mais seulement 11 voitures Ă  voyageurs. Ce qui explique que, dĂšs fin juillet 1944, ils faisaient dĂ©jĂ  circuler pour l’approvisionnement du front, bien avant les Britanniques, vers Saint-LĂŽ ou Lison, plus de 230 trains de marchandises transportant 32 000 t de matĂ©riel, et 102 trains de personnel ! La part de matĂ©riel arrivĂ© puis Ă©vacuĂ© des ports par voie ferrĂ©e, d’octobre 1944 Ă  mai 1945, croĂźt ainsi de 10 Ă  48 % et atteint 13 millions de tonnes du 16 octobre 1944 au 24 mars 1945, pour la seule Normandie. De mĂȘme, les transports militaires d’ouest en est de la Seine sont, dĂ©but 1945, de 10 au rail pour 1 Ă  la route. Certains militaires alliĂ©s reconnaissent alors qu’heureusement les “ dĂ©tours ” Ă©taient partout possibles pour Ă©viter les obstacles, ou coupures majeures effectuĂ©es par les armĂ©es en retraite bibliogr. [27]. 24. Si l’on tient compte globalement de l’Ouest europĂ©en, 955 000 t de bombes RAF, 1 million de tonnes USAF ont Ă©tĂ© lĂąchĂ©es. Avec le pourcentage moyen d’objectifs ferroviaires de 14 % RAF et 26 % USAF, on trouve moins de 1 t au but pour 7 larguĂ©es et 1 homme d’équipage perdu pour 32 t lĂąchĂ©es
 ce qui explique la pertinence des interrogations, hĂ©las tardives. Par contre, fort heureusement et bien que ce soit toujours trop Ă©levĂ©, les cheminots français ont comptĂ© 2 361 morts en service, dont plus de 90 % suite aux raids aĂ©riens, mais non moins de 309 fusillĂ©s et 2 480 dĂ©portĂ©s, transportĂ©s par rail comme les autres. 25. Il n’est pas inintĂ©ressant de mentionner qu’un projet de publication d’un atlas ferroviaire aĂ©rien couvrant cette pĂ©riode, avec le regrettĂ© J. Salin de La Vie du rail, n’a pu aboutir dans les annĂ©es 1970, trente ans aprĂšs les faits, pour cause supposĂ©e de “ secret-dĂ©fense ” cĂŽtĂ© français. La guerre restait tiĂšde sous les cendres, ou mal refroidie. 26. Les conclusions de 1945 dans le domaine ferroviaire rejoignent celles constatĂ©es pour la marine, et citĂ©es par P. Masson en 1988 bibliogr. [9], au sujet des limites de la puissance aĂ©rienne le rĂŽle de l’aviation s’est rĂ©vĂ©lĂ© capital, mais, dĂšs les premiĂšres annĂ©es de guerre, les thĂ©ories amĂ©ricano-britanniques sur les bombardements Ă  haute altitude en vol horizontal se sont “ uniformĂ©ment soldĂ©es par des Ă©checs ” sur des objectifs prĂ©cis. Quant au rail français, s’il y eut bien des constats posthumes d’inutilitĂ©s et d’erreurs, aucun des AlliĂ©s, hors cas spĂ©cifiques locaux, ne mit de vigilance ou de cĂ©lĂ©ritĂ© Ă  changer de politique ou de directive, en cours d’action pour Ă©viter davantage de victimes civiles françaises, l’inertie du systĂšme valant bien celle de la SNCF, fin 1944, comme le rappelait trĂšs rĂ©cemment Pierre Sudreau, Ă  propos des derniers trains de dĂ©portĂ©s vers l’Allemagne Le Rail, no 81 juillet-aoĂ»t 200, p. 40. _______________ TABLEAU 1. — Raids aĂ©riens “ Desert Rail ” en France de mars Ă  juillet 1944 96 raidsRĂ©sultats constatĂ©s sur les opĂ©rations majeures impliquant plus de 50 avions MoisRaidsnombreAvionsimpliquĂ©sPertes BombesdĂ©versĂ©es Pourcentage de “ rĂ©ussite ”ImmeublescivilsdĂ©truits, nonrĂ©parables1944RAF +USAFBombar-diers seulsAvions%Tonnage testimĂ©eselonRAF/USAFdĂ©comptĂ©e sur photos Mortscivilsy. MarsRAF 14 1 783 261,4 6 5682112 1 375 816AvrilRAF 16 3 991 471,1 7 0796035 ? 589MaiRAF 26 4 264 982,3 15 9202626 1 341 1 674JuinRAF 15 2 245 743,2 8 6136730 1 582 2 100JuilletRAF 18 2 612 752,8 8 5404120 3 795 1 800Mars et seule 7 667 121,6 1 6805010 3 982 3 465Total en 5 mois96 15 562 332 - 2 300 morts2,1 48 400462211 97510 444Sur total France170195 000 2 900 - 21 000 morts 610 000 ? ? ?67 078Proportion Rail % 8 11 8 15,5 _______________ Bibliographie En langue française [1] Eddy Florentin , Quand les AlliĂ©s bombardaient la France. 1940-1945, Paris, Perrin, 1997. [2] T. A. Siefring, L’US Air Force dans la DeuxiĂšme Guerre mondiale, Paris, EPA, 1979. [3] ClĂ©ment Ader, Les vĂ©ritĂ©s sur l’utilisation de l’aviation militaire avant et pendant la guerre 1914-1918, Toulouse, Douladourre, 1919. [4] Ducellier, La guerre aĂ©rienne dans le Nord de la France, 5 vol., Abbeville, Paillart, 1994-1999. 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3 place du 19 avril 1944 rouen